08nov.2015
Notre Histoire : nos textes, nos images, nos films
Pendant ce mois de novembre 2015, nous sommes lancés dans un travail de collecte de textes, de paroles de chansons, d’images, de tableaux, de séquences de film qui nous parlent de notre Histoire collective et de notre identité.
L’idée est que chacun apporte un texte ou une image, en photocopie, à mettre dans le pot commun. Il en prépare la présentation au groupe : lecture ou description + brève analyse de ce qui le touche.
L’objectif est de présenter ce matériel à Marie-Aude lors de la séance du mercredi 25 novembre.
Voici le matériel collecté et une première proposition de mise en jeu :
I. La guerre contre l’Allemagne
-Julien : « Ordre de mobilisation générale de septembre 1914 »
Lire un extrait.
Ce qui me touche, c’est de me dire que ce sont des jeunes qui avaient parfois 21 ans ou moins qui l’ont lu et qui devaient partir faire la guerre. Un jour, en 2020, l’année de mes 21 ans, j’imagine que je lis avec mes potes l’ordre de mobilisation générale pour la troisième guerre mondiale. Cette fois, c’est nous qui devons partir.
-Elliot : « Jaurès a été assassiné » (la une de l’Humanité en août 14)
Lire un extrait.
Commenter ce qui te touche.
-Joseph :
Ce livre a été écrit par Olivier Hussenot, qui était mon grand père. Il l’a écrit pour raconter sa guerre, la seconde guerre mondiale, mais il a préféré prendre un ton léger. C’est pour ça que j’aime ce texte.
Lire un extrait.
-Kalinka
Otto Dix était un peintre allemand. Dans Les joueurs de skat, il montre des mutilés de guerre qui jouent aux cartes.
Décrire le tableau.
Mon arrière-grand-père était mutilé.
-Emeline :
Ce sont les vœux du général de Gaulle aux enfants le 24 décembre 1941.
Lire un extrait
Il dit que Noël est beau dans la guerre.
-Manon :
Moi en fait j’aimerais bien qu’on parle un peu de paix. Il y a des poèmes sur la paix à la médiathèque. Des très beaux. Mais je me souviens surtout de l’épitaphe d’un soldat pendant la Grande Guerre :
« On nous a envoyés nous battre, les doigts dans le trou du cul
On nous a tués, les doigts dans le trou du cul
Priez pour nous, les doigts dans le trou du cul »
Ce serait bien qu’on soit un peu vulgaires.
-Coline : « Le chant des Partisans »
Chanter le premier couplet.
Le « Chant des Partisans », pour moi, ce n’est pas une chanson triste. C’est une chanson sur l’espoir. Pendant la semaine des attentats, je parlais par messages avec ma grand mère. Je lui disais que je n’avais plus goût à rien. Elle me disait que c’était con. Enfin, elle ne me le disait pas comme ça, puisque c’était ma grand mère.
Chanter le couplet sur les rêves et le refrain
Aujourd’hui, au creux de nos lits, on fait des rêves. Et eux, à l’époque, ils faisaient des rêves. Lesquels ? C’est ça que je me demande.
- Julie :
Ce film, La Vague, m’a beaucoup marquée. Il ne se passe pas en France mais en Allemagne. Dans un lycée. Au début, les jeunes pensent que le nazisme ne les concerne plus mais un de leurs profs leur dit : « Mettez-vous debout et marchez en rythme ». Ils ne veulent pas le faire et puis ils le font. Ils découvrent qu’ils ont du plaisir à le faire. Puis ils adoptent un costume, un signe. Ils forment un groupe. Ils deviennent violents. A la fin, le professeur leur montre un portrait de Hitler, pour leur faire comprendre le sens de l’expérience. Ce film pose une question : « Est-ce que c’est possible que ça recommence ? » Elle nous concerne peut-être aussi en France. La solidarité, c’est bon mais c’est pas tout le temps bon.
II. Souvenir
-Tristan « Douce France »
Chanter un couplet et le refrain.
C’est toute une époque, celle de Charles Trénet. C’est touchant.
-Olga :
Ce manuel d’histoire, il a une histoire compliquée. J’avais oublié de le rendre, alors nous avons été obligés de le repayer. Ensuite seulement, je l’ai retrouvé. C’est comme ça que nous l’avons gardé. Dedans se trouve un témoignage d’un soldat français sur la guerre d’Algérie, que nous avions lu en classe.
Lire un extrait (celui sur la torture et les exécutions ?).
Je sais que des gens de ma famille ont fait cette guerre. Un grand oncle. Mais c’est un sujet qu’on préfère ne pas trop aborder dans les familles, et qu’on ne traite que depuis peu dans les manuels d’histoire. Ce témoignage, je ne sais pas pourquoi je m’en souviens mais je m’en souviens.
-Emilien : Ce vieux dessin animé s’appelle je ne sais plus comment, ah oui, Brendan et le secret de Kells. J’aime bien le passage qui dit : « J’ai vu le livre qui… »
Dire l’extrait.
J’aime ce côté décalé. Ca me fait penser à un fantôme qui saurait la vérité de l’histoire, parce qu’il l’aurait vue, lui, mais personne ne voudrait l’entendre.
-Augustin : « Vercingétorix jette ses armes aux pieds de César ».
Décrire l’image
Mais, comme nous sommes dans un album d’Astérix, César hurle de douleur en se prenant les armes sur les pieds. Je sais que c’est tiré d’un tableau célèbre mais moi, je préfère cette image. C’est un truc rigolo et j’aime bien les trucs rigolos. Une façon de raconter l’histoire différente de celle de l’école, qui fait que je m’en souviens mieux.
III. Marseillaises
-Clémence :
C’est un film de propagande américaine tourné pendant la seconde guerre. Ca se passe à Casablanca. Des Français et des Allemands sont réunis dans une sorte de café. Les Allemands se mettent à chanter. Alors un résistant, qui n’est pas français mais polonais, se lève, tout seul, et il entonne la « Marseillaise ». Peu à peu, tous les Français présents dans le café se mettent à chanter, tous ensemble, et ça finit par couvrir les voix des Allemands. On voit un gros plan sur le visage d’une femme, dans le film elle est alcoolique, je crois, mais là, elle chante à pleins poumons. On voit qu’elle pleure. Et moi aussi, chaque fois que je vois cette scène, je me sens émue comme cette femme.
-Emeline :
Décrire le tableau
Cette femme, La Liberté, guide le peuple mais aussi elle pousse les gens à se faire tuer. Dans un coin, il y a un enfant émouvant.
-Camille M (ou un Terminale)
Je n’ai jamais aimé cet hymne, peut-être à cause de ses paroles sanglantes. Mais, lors de la manifestation de Charlie Hebdo, pour la première fois de ma vie, j’ai eu envie de la chanter.
« Allons enfants de la patrie
Le jour de gloire est arrivé ! »
J’en étais surprise moi-même.
« Contre nous de la tyrannie
L’étendard sanglant est levé »
Ce jour-là, à cet endroit-là, j’étais heureuse aussi que plein d’autres gens aient envie de la chanter avec moi.
« Entendez-vous dans nos campagnes
Mugir ces féroces soldats ? »
Ce que je me demande, c’est si j’aurais encore envie de la chanter aujourd’hui. Et vous, vous l’avez chantée ce jour-là ? Et aujourd’hui vous la chanteriez encore ?
« Qui viennent jusque dans nos bras
Egorger nos fils et nos compagnes ! »
Non, je crois que ça ferait vraiment trop bizarre. En fait, la Marseillaise, on ne peut pas la chanter comme ça, sans que ça fasse bizarre. Il faut avoir une occasion. »
-Robin
Moi, j’ai ramené une chanson. « Paris en Colère ». Notre hymne national, il ne me touche pas. Je n’en suis pas très fier. On va verser le sang de nos amis, enfin, non, je ne me souviens pas bien des paroles dès que je ne les chante pas dans l’ordre, c’est plutôt le sang impur de nos ennemis qu’on va verser dans les sillons. Quels ennemis sont impurs, d’abord, les ennemis religieux ? Non, non, ce n’est pas possible. « Paris en colère », c’est violent aussi mais violent beau.
Chanter un couplet.
Ce serait peut-être bien si cette belle chanson devenait notre hymne national à la place de cette idiotie de "Marseillaise", non ? D’accord, je n’insiste pas, je ne voudrais pas qu’on verse mon sang impur dans les sillons…
IV. Les femmes
-Camille Q
C’est une petite photo d’une petite bonne femme. Elle est debout devant un pupitre en train de lire. Pendant ce temps, elle se fait à moitié huer mais elle va jusqu’au bout. Elle s’appelle Simone Weil. Elle a été déportée à seize ans et elle a réussi à être ministre. Elle est une femme qui s’est exprimée sur les femmes devant une assemblée d’hommes.
-May : « Appel aux femmes pour exercer leur droit de vote » publié dans le journal Libération en 1944
Comme je suis une fille, je me sens concernée. S’il n’y avait pas eu ça, ce serait encore pire. Je suis reconnaissante.
-Alexie
J’ai apporté une photo des Années Folles.
L’année dernière, je suis allée à Auschwitz. Ca m’a marqué. Beaucoup trop à un moment. Les Années Folles, c’est quelque chose d’une gaieté après un traumatisme. Ces quatre femmes sont en train de danser le charleston. Les plumes, la grande robe, les colliers. Elles se trouvent sous un chapiteau.
Moi, je ne sais pas danser le charleston. C’est quelque chose de joyeux. Quelque chose qu’il faut oser.
Danser un pas de charleston.
Voilà, ce sera ma contribution : une femme qui danse pendant les Années Folles.
-Robin
Alors, moi j’ai ramené une chanson. « Paris en colère », c’est chanté par Mireille Mathieu, et Mireille Mathieu, jusqu’à nouvel ordre, c’est une femme.
Chanter un deuxième couplet.
-Camille M
Sur cette photo en noir et blanc, une femme se trouve au premier rang, sur un côté, elle n’a déjà plus de cheveux, un homme lui tord le visage et il finit de la tondre. Je vois une foule et aussi un petit enfant qui est en train de se marrer. Je comprends qu’on puisse être choqués que des femmes couchent avec des soldats de la Gestapo, mais certaines étaient seulement amoureuses. Nous nous sommes battus pour de belles choses mais il y a toujours ces retombées. Ce sont nos côtés sombres. J’aimerais que la France, ce ne soit que notre élan, la liberté d’expression, 68, etc… A quoi bon avoir de grandes idées si c’est pour avoir des femmes tondues à côté ?
V. Je suis Paris
-May :
C’est l’une des premières photos de « La tour Eiffel ».
Décrire la photo
J’aime beaucoup la fin du XIXième siècle. C’est un moment qui représente la France et qui est menacé. La prochaine victime, ce sera peut-être la Tour Eiffel. Ils l’ont menacée. Je ne sais pas comment on peut les appeler, ces…. . Disons les « pas gentils ». En tout cas, si on la détruisait, je ne me sentirais vraiment pas bien.
-Robin
Alors, moi, j’ai ramené une chanson. « Paris en colère ». Si, si, je suis désolé, j’aime beaucoup cette chanson. Vraiment. En plus, quand on parle de la France, on en vient à parler de Paris. Enfin, à l’international, comme on dit.
Chanter un troisième couplet.
-Manon :
Je viens de commencer un livre, je ne l’ai pas encore fini. Irène Némirovsky a été déportée à Auschwitz, elle est morte en 1942. Au début de « Suite Française », elle raconte l’alarme dans Paris. Les Allemands arrivent, tous les Français fuient sans savoir où ils vont.
Lire l’incipit.
Si les attentats se prolongent, il y en a peut-être pleins qui auront envie de fuir. J’imagine plein de « nous » qui traversent la Seine, enfin la scène, avec plein de trucs, par exemple des cages à oiseaux. Ca pourrait presque être marrant.
-Nounée
Je vais vous lire un poème de Jacques Prévert. Avant il y avait les Français, comme on dit, « pure souche ». Maintenant, il y a des Algériens, des Africains, des Asiatiques, des ? (note : je n’arrive plus à relire le terme que tu as employé, mais nous en avons parlé ensemble).
Le poème s’appelle « Etranges Etrangers »
Lire le début.
Maintenant on a plein d’origines, on a plein de religions. C’est cette image que j’ai de la France.
-Laura
« On s’embrassera en abominables pervertis ». Ce texte de Luc le Vaillant a été publié dans le journal « Libération » quelques jours après le 13 novembre. Il m’a été donné par mon prof et il lui avait été donné par l’une de ses élèves de 2nde.
Lire des extraits
-Didier : Le discours du général de Gaulle le 25 août 44.
Lire le passage sur Paris
C’est beau, tout simplement. Paris peut souffrir, Paris peut tomber mais Paris peut toujours se relever.
VI. Les symboles nationaux
-Théo
C’est une photo de notre Président. Dans toute sa splendeur. Mais je n’ai pas choisi la photo officielle du quinquennat.
Décrire la photo : Il se trouve dans une salle de classe. Il a un regard halluciné et un sourire un peu niais. Si on ne savait pas que c’était le Président, on dirait un débile.
Ce qui est vraiment symbolique dans cette photo, c’est qu’on vit dans un pays où on a le droit de se moquer de tout le monde sans avoir de problèmes. Je trouve intéressant de pouvoir se moquer publiquement de notre dirigeant. Comme ça, au moins, on a vraiment la preuve qu’on n’est pas en Corée du Nord.
-Marie
Sur le dessin, il y a notre symbole, le coq français, mais il est « élevé au rosbeef ».
Décrire le dessin.
Moi, j’aime beaucoup le rugby. Avec l’Angleterre, on s’est beaucoup battu, pendant la guerre de cent ans, et un peu après. Ca perdure dans des rivalités sportives mais dans le fond on s’aime bien. Le rugby, ça aide, parce que c’est sain. Même avec nos pires ennemis, on a réussi à ne pas rester ennemis. Ca donne de l’espoir. Ce qu’on devrait faire, c’est organiser un match de rugby contre Daesh, pour détendre l’atmosphère. En plus, on pourrait leur mettre la pâtée.
-Enzo :
Décrire le tableau (sans dire de qui il s’agit).
Cette femme habite au Louvre. Des milliers de gens viennent lui rendre visite chaque jour. Moi aussi, j’y suis allé. Tout le monde l’admire. C’est un symbole, c’est pour ça que je l’ai choisie, elle fut ma première rencontre avec l’art, mais, dans le fond, je ne peux pas vraiment dire que je la trouve belle. En fait, elle est mondialement connue, et moi, je ne sais pas trop quoi en penser. Je ne sais pas si c’est un problème. Est-ce que c’est amusant ou angoissant, autorisé ou interdit, d’être la seule personne au monde à ne pas avoir un avis sur cette putain de Joconde ?
-Robin
Moi j’ai un avis très tranché sur Mireille Mathieu. J’adore. Elle est depuis des décennies notre plus beau symbole national au Japon et ailleurs. Par exemple « Paris en colère ».
Chanter le dernier couplet et le refrain.