oeil de minerve ISSN 2267-9243 - Mot-clé - scienceRecensions philosophiques2023-12-27T09:56:23+01:00Académie de Versaillesurn:md5:b5151268a8c1e471830557044d755c66DotclearLéna Soler, Introduction à l’épistémologie, Ellipses 2019, lu par Jonathan Racineurn:md5:7c614a56608dbad918fcebd2e871f3c62020-11-16T20:06:00+01:002021-02-12T21:52:25+01:00Florence Benamouexplicationréalismesciencethéorie<p class="Standard" style="margin:0cm 0cm 0.0001pt; -webkit-text-stroke-width:0px; text-align:justify"><span style="font-size:10pt"><span style="font-family:"Times New Roman""><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande""><span style="color:black"><img alt="" class="media" src="http://blog.ac-versailles.fr/oeildeminerve/public/.soler_s.jpg" style="float: left; margin: 0 1em 1em 0;" />L. Soler est une spécialiste reconnue de philosophie des sciences. Cette troisième édition d’un manuel qui se veut réellement une <i>introduction</i> comporte des changements significatifs par rapport à la première édition, notamment l’ajout d’un chapitre qui mérite une attention particulière.</span></span></span></span></span></p> <p class="standard" style="text-align:justify; margin:0cm 0cm 0.0001pt"><span style="font-size:10pt"><span style="font-family:"Times New Roman""><b><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande""><span style="color:black">Chapitres 1-3 : distinctions élémentaires</span></span></span></b></span></span></p>
<p class="standard" style="text-align:justify; margin:0cm 0cm 0.0001pt"> </p>
<p class="standard" style="text-align:justify; margin:0cm 0cm 0.0001pt"><span style="font-size:10pt"><span style="font-family:"Times New Roman""><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande""><span style="color:black"> Les trois premiers chapitres, très didactiques, sont consacrés à poser des définitions et distinctions élémentaires. On s’intéresse ainsi au sens général du terme ‘épistémologie’. Lorsqu’il s’agit de préciser son objet, on retient le sens francophone pour lequel l’épistémologie concerne la science, plutôt que le sens anglo-saxon, qui fait de l’épistémologie une réflexion sur la connaissance. Le problème est alors de déterminer s’il faut parler de la science ou des sciences. Quelles relations entretiennent l’épistémologie générale et les épistémologies régionales ? L’auteur nous propose aussi un premier travail de classification des sciences</span></span></span></span></span></p>
<p class="standard" style="text-align:justify; margin:0cm 0cm 0.0001pt"><span style="font-size:10pt"><span style="font-family:"Times New Roman""><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande""><span style="color:black"> Dans le chapitre 2, elle s’interroge sur ce qui distingue l’épistémologie d’autres types de discours sur la science, tels que l’histoire ou la sociologie des sciences.</span></span></span></span></span></p>
<p class="standard" style="text-align:justify; margin:0cm 0cm 0.0001pt"><span style="font-size:10pt"><span style="font-family:"Times New Roman""><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande""><span style="color:black"> Le troisième chapitre, « outils pour la caractérisation des sciences empiriques », poursuit ce travail d’introduction de concepts fondamentaux : par exemple ceux de vérité, de théorie, de modèle. On y aborde aussi la question de l’instrument (« théorie matérialisée », selon la formule de Bachelard), celle de la mathématisation et enfin le concept d’explication.</span></span></span></span></span></p>
<p class="standard" style="text-align:justify; margin:0cm 0cm 0.0001pt"><span style="font-size:10pt"><span style="font-family:"Times New Roman""><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande""><span style="color:black"> Concernant la mathématisation, l’exemple de Planck et des débuts de la physique quantique permet d’illustrer l’idée selon laquelle les mathématiques ne sont pas qu’un outil de précision : de Boltzmann à Planck puis Einstein, « la forme mathématique fonctionne comme un vecteur d’innovation » dans la mesure où « elle <i>précède</i> le concept physique d’énergie quantifiée ; elle <i>appelle</i> une interprétation physique, et jusqu’à un certain point <i>l’induit </i>» (p. 74).</span></span></span></span></span></p>
<p class="standard" style="text-align:justify; margin:0cm 0cm 0.0001pt"><span style="font-size:10pt"><span style="font-family:"Times New Roman""><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande""><span style="color:black">Quant au concept d’explication, celui-ci est analysé en le confrontant d’une part à la description, d’autre part à l’interprétation et à la compréhension. Ce dernier point permet de rappeler la distinction opérée par Dilthey ou encore Weber. L’importance de cette distinction, qui permet de fonder l’opposition entre sciences de l’homme et sciences de la nature, ne doit pas éclipser la difficulté à distinguer explication et description : la différence semble relative dans la mesure où ce qui peut apparaître comme pur compte-rendu à une époque ou à un observateur pourra s’apparenter à une explication à un autre. Il faudrait alors considérer qu’il y a une multiplicité de niveaux de description, tel niveau étant dit explicatif pour tel autre, plus superficiel.</span></span></span></span></span></p>
<p class="standard" style="text-align:justify; margin:0cm 0cm 0.0001pt"><span style="font-size:10pt"><span style="font-family:"Times New Roman""><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande""><span style="color:black">On peut poursuivre cette analyse de l’explication en distinguant un sens fort et un sens faible, selon le type de cause que l’on invoque ou recherche. Ces distinctions apparaissent importantes pour comprendre ce que veulent dire des auteurs comme Comte, qui considèrent que la science doit se contenter de rechercher des lois et non des causes : si par explication on entend la recherche de causes ultimes, alors la tâche de la science est seulement descriptive. Mais c’est là un sens fort d’explication : l’énoncé de lois peut être considéré comme une explication, en un autre sens.</span></span></span></span></span></p>
<p style="margin:0cm 0cm 10pt"> </p>
<p style="margin-bottom:.0001pt; text-align:justify; margin:0cm 0cm 10pt"> </p>
<p style="margin-bottom:.0001pt; text-align:justify; margin:0cm 0cm 10pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman""><b><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande""><span style="color:black">Chapitre 4 : valeur de la science empirique : mise à l’épreuve et démarcation (Le Cercle de Vienne et ses critiques)</span></span></span></b></span></span></p>
<p style="margin-bottom:.0001pt; text-align:justify; margin:0cm 0cm 10pt"> </p>
<p style="margin-bottom:.0001pt; text-align:justify; margin:0cm 0cm 10pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman""><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande""><span style="color:black">Une fois ces définitions et outils conceptuels mis en place, c’est avec le quatrième chapitre, « valeur de la science empirique : mise à l’épreuve et démarcation », que l’on entre plus avant dans la discussion de problèmes et de thèses épistémologiques. Ce qui fait la valeur de la science, semble-t-il, c’est son rapport aux faits – c’est aussi ce qui semble la distinguer d’autres types de discours, dont le rapport aux faits est plus fragile. Seulement, qu’est-ce qu’un fait ? Il faut distinguer entre le fait et un énoncé à son propos – et ces énoncés sont eux-mêmes, si l’on suit le Cercle de Vienne, de deux ordres : les énoncés observationnels et les énoncés théoriques.</span></span></span></span></span></p>
<p style="margin-bottom:.0001pt; text-align:justify; margin:0cm 0cm 10pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman""><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande""><span style="color:black"> L’examen de la position de Carnap permet de préciser ces points : celui-ci cherche à « fonder la science sur une base empirique ferme et invariante ». Il s’agit d’une thèse vérificationniste, qui est censée fournir un critère de démarcation entre science et non-science : est scientifique ce qui est vérifiable, et est vérifiable ce qui peut être mis en rapport avec des perceptions. La base ferme recherchée serait fournie par des énoncés d’observation absolument irrécusables. Un tel énoncé « est supposé être obtenu chaque fois que nous enregistrons immédiatement par écrit nos expériences vécues, les perceptions, aussi bien que tous les sentiments et toutes les pensées’ » (p. 98).</span></span></span></span></span></p>
<p style="margin-bottom:.0001pt; text-align:justify; margin:0cm 0cm 10pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman""><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande""><span style="color:black"> C’est bien sûr l’existence d’une telle base empirique qui pose question : celle-ci ne peut jamais être complète ; dès que l’on énonce quelque chose, on opère une sélection. Et cette sélection implique un jugement de pertinence, dans lequel peuvent intervenir le but poursuivi (que cherche-t-on ?) et les croyances des locuteurs (présupposés divers, théories scientifiques admises).</span></span></span></span></span></p>
<p style="margin-bottom:.0001pt; text-align:justify; margin:0cm 0cm 10pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman""><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande""><span style="color:black"> Ceci fragilise la thèse carnapienne, mais une critique beaucoup plus radicale consiste à dire qu’énoncer, c’est véritablement constituer. Le langage, en tant que système de concepts, impose un découpage du monde ; et donc, recourir à un certain langage, c’est implicitement adopter une théorie : « tout énoncé a le caractère d’une théorie, d’une hypothèse » (Popper). Notre « schème conceptuel » (Quine) détermine la réponse à la question ontologique ‘qu’est-ce qui existe ?’ Il n’y aurait donc pas de langage d’observation neutre, le langage n’est pas un reflet.</span></span></span></span></span></p>
<p style="margin-bottom:.0001pt; text-align:justify; margin:0cm 0cm 10pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman""><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande""><span style="color:black"> Admettons néanmoins que l’on s’en tienne à la situation où tous les locuteurs partagent le même schème conceptuel ; la question de la vérification des énoncés d’observation se pose encore. Comment garantir la vérité des énoncés d’observation ? Par ma conviction subjective que je vois bel et bien tel objet ? Par l’accord intersubjectif ? Ceci n’est pas une véritable justification. La signification même des termes d’observation ou ce qui est identifié comme ‘fait’ est variable.</span></span></span></span></span></p>
<p style="margin-bottom:.0001pt; text-align:justify; margin:0cm 0cm 10pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman""><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande""><span style="color:black">On conclut de ces remarques que toute observation est chargée de théorie et que la base empirique à laquelle se réfère l’empirisme logique est problématique. L’auteur nous propose de distinguer quatre composantes dans l’idée que les faits sont chargés de théorie. En effet, les théories sélectionnent les faits pertinent, conduisent à les énoncer d’une certaine manière, fixent la signification des faits-énoncés et conditionnent des décisions relatives à la valeur de vérité des énoncés d’observation (p. 112).</span></span></span></span></span></p>
<p style="margin-bottom:.0001pt; text-align:justify; margin:0cm 0cm 10pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman""><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande""><span style="color:black"> Ce que l’on considère comme ‘base empirique’ n’est alors rien de plus qu’un ensemble d’énoncés faisant consensus à une époque donnée, pour des raisons indissociablement théoriques, psychologiques et pragmatiques. Mais dire cela n’est pas une pure et simple remise en question de l’idée de base empirique dans la mesure où, d’un point de vue pratique, il reste possible, de manière très circonscrite, d’isoler des énoncés qui fonctionnent comme des faits solidement établis.</span></span></span></span></span></p>
<p style="margin-bottom:.0001pt; text-align:justify; margin:0cm 0cm 10pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman""><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande""><span style="color:black"> La suite du chapitre porte sur les difficultés que l’on trouve sur l’autre versant de l’édifice, à savoir la vérification des énoncés <i>théoriques</i>. Parmi ces énoncés, considérons d’abord les lois scientifiques. L’énoncé d’une loi doit faire face au problème de l’induction : comment peut-on affirmer que la loi sera vérifiée pour tous les cas futurs ? La difficulté s’applique aux prédicats dispositionnels (un corps <i>soluble</i>, ou <i>magnétique</i>) : on retrouve la même structure prédictive ‘si… alors’ caractéristique des lois universelles. Ces difficultés conduisent à envisager la substitution de la confirmation à la vérification, une démarche qui consisterait à estimer la plausibilité des énoncés théoriques, plutôt qu’à chercher à les prouver. Cela renvoie au projet carnapien d’une logique inductive et aux approches dites ‘néo-bayesiennes’, que l’auteur se contente de mentionner (et qu’il semble effectivement difficile de développer dans un manuel introductif).</span></span></span></span></span></p>
<p style="margin-bottom:.0001pt; text-align:justify; margin:0cm 0cm 10pt"> </p>
<p style="margin-bottom:.0001pt; text-align:justify; margin:0cm 0cm 10pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman""><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande""><span style="color:black"> Ces critiques de l’empirisme logique nous conduisent à examiner les principales thèses adverses : le falsificationnisme de Popper et le holisme de Duhem-Quine.</span></span></span></span></span></p>
<p style="margin-bottom:.0001pt; text-align:justify; margin:0cm 0cm 10pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman""><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande""><span style="color:black">Popper partage avec le cercle de Vienne la quête d’un critère de démarcation entre science et non-science. Mais il renonce à chercher ce critère du côté de la confirmation empirique : c’est « la falsifiabilité, et non la vérifiabilité d’un système qu’il faut prendre comme critère de démarcation » (<i>La logique de la découverte scientifique</i>, cité p. 119). Autrement dit, une théorie est qualifiée de scientifique si elle peut être réfutée par l’expérience. Dans cette perspective, le progrès scientifique prend la forme d’une activité destructrice : il s’agit d’éliminer toujours plus d’énoncés faux.</span></span></span></span></span></p>
<p style="margin-bottom:.0001pt; text-align:justify; margin:0cm 0cm 10pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman""><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande""><span style="color:black"> Mais le falsificationnisme est-il une description de la pratique effective de la science ou une norme qui devrait régir l’activité scientifique ? Pour Popper, c’est bel et bien une théorie descriptive… au risque de se voir opposer des contre-exemples. On peut même se demander si c’est un idéal souhaitable dans la mesure où les théories nouvelles s’imposent rarement d’emblée et doivent d’abord faire face à des réfutations.</span></span></span></span></span></p>
<p style="margin-bottom:.0001pt; text-align:justify; margin:0cm 0cm 10pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman""><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande""><span style="color:black">D’où les amendements que l’on peut trouver notamment chez Lakatos : il ne faudrait pas négliger toutes les corroborations, qui jouent bel et bien un rôle dans l’histoire des sciences ; et il ne faut pas non plus mettre sur le même plan toutes les falsifications. </span></span></span></span></span></p>
<p style="margin-bottom:.0001pt; text-align:justify; margin:0cm 0cm 10pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman""><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande""><span style="color:black">Le dernier point de ce chapitre analyse une position radicalement opposée au positivisme : le holisme, qui considère qu’une théorie ou une hypothèse ne fonctionnent jamais de manière isolée, ce qui remet radicalement en question la conception de la vérification. Le holisme peut être résumé par trois thèses fondamentales :</span></span></span></span></span></p>
<p style="margin-bottom:.0001pt; text-align:justify; margin:0cm 0cm 10pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman""><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande""><span style="color:black">- la sous-détermination de la théorie par l’expérience : si une expérience contraire se présente, « on a toute liberté pour choisir les énoncés qu’on veut réévaluer » (Quine, « Les deux dogmes de l’empirisme », cité p. 131)</span></span></span></span></span></p>
<p style="margin-bottom:.0001pt; text-align:justify; margin:0cm 0cm 10pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman""><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande""><span style="color:black">- la possibilité de théories empiriquement équivalentes : des théories différentes sont susceptibles de rendre compte d’un même ensemble d’énoncés d’observation.</span></span></span></span></span></p>
<p style="margin-bottom:.0001pt; text-align:justify; margin:0cm 0cm 10pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman""><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande""><span style="color:black">- aucun énoncé n’est à l’abri de la réfutation / tout énoncé peut toujours être sauvé de la réfutation. Ou encore, comme le dit Quine : « on peut toujours préserver la vérité de n’importe quel énoncé, quelle que soient les circonstances. Il suffit d’effectuer des réajustement énergiques dans d’autres régions du système. […] Réciproquement, aucun énoncé n’est tout à fait à l’abri de la révision ».</span></span></span></span></span></p>
<p style="margin-bottom:.0001pt; text-align:justify; margin:0cm 0cm 10pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman""><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande""><span style="color:black"> Le lien avec le conventionnalisme est manifeste : puisque l’expérience ne contraint pas la théorie de manière absolue, les décisions prises quant au choix des hypothèses retenues auraient pu être autres, et il y a là une part de convention. Ce sont également ces thèses holistes qui fondent le refus de la notion d’expérience cruciale.</span></span></span></span></span></p>
<p style="margin-bottom:.0001pt; text-align:justify; margin:0cm 0cm 10pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman""><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande""><span style="color:black"> Le holisme constitue une critique de la conception positiviste, mais il porte également atteinte au falsificationnisme : « si n’importe quelle hypothèse peut être sauvée de la réfutation, il suffit pour ce faire d’imputer la fausseté non pas à l’hypothèse à tester, mais à des hypothèses auxiliaires » (p. 136). Pour défendre sa position Popper prend soin de critiquer les hypothèses <i>ad hoc</i> – par exemple, pour sauver la théorie de l’éther immobile mise à mal par l’expérience de Michelson et Morley, Lorentz ajoute une hypothèse nouvelle : « les corps mobiles subissent une contraction de longueur dans la direction du mouvement, qui a pour effet de rendre indétectable leur mouvement par rapport à l’éther » (alors qu’on attendrait à ce que soit détectable un mouvement relatif de la terre par rapport à l’éther immobile). Une telle hypothèse est taillée sur mesure pour sauver la théorie, ce qui n’est pas le cas lorsque l’on en vient à postuler l’existence d’une planète inconnue dans le voisinage d’Uranus pour sauver la théorie newtonienne : dans ce cas l’hypothèse a d’autres conséquences testables que simplement rendre compte d’une anomalie particulière dans les prédictions faites sur la base de la théorie newtonienne.</span></span></span></span></span></p>
<p style="margin-bottom:.0001pt; text-align:justify; margin:0cm 0cm 10pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman""><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande""><span style="color:black">Au final, Popper considère que sa position est parfaitement compatible avec un holisme modéré et raisonnable.</span></span></span></span></span></p>
<p style="margin-bottom:.0001pt; text-align:justify; margin:0cm 0cm 10pt"> </p>
<p style="margin-bottom:.0001pt; text-align:justify; margin:0cm 0cm 10pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman""><b><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande""><span style="color:black">Chapitre 5 : le réalisme en question</span></span></span></b></span></span></p>
<p style="margin-bottom:.0001pt; text-align:justify; margin:0cm 0cm 10pt"> </p>
<p style="margin-bottom:.0001pt; text-align:justify; margin:0cm 0cm 10pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman""><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande""><span style="color:black">Le chapitre 5 traite du rapport entre une théorie scientifique et son objet. La question rejoint en grande partie celle de la partie précédente, mais ici c’est le concept de réalisme dans ses différentes versions qui est mis en avant. Le réaliste défend la thèse selon laquelle les théories scientifiques sont au moins approximativement vraies, et cela au sens où elles correspondent à la réalité, elles en constituent une sorte de reflet. Le réalisme naïf, qui défendrait l’idée d’une vérité absolue des théories scientifiques, est écarté rapidement (et pour cause : un tel réalisme n’est semble-t-il défendu par personne) au profit d’un réalisme dit convergent, qui considèrent que les théories scientifiques gagnent en précision au cours d’un progrès scientifique, et qu’elles peuvent contenir à un moment donné des éléments qui ne sont pas vrais.</span></span></span></span></span></p>
<p style="margin-bottom:.0001pt; text-align:justify; margin:0cm 0cm 10pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman""><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande""><span style="color:black">L’argument principal retenu au crédit de la thèse réaliste est celui de l’efficacité prédictive. Mais l’antiréaliste peut rétorquer que, tout comme un même objectif peut être atteint de plusieurs manières, de même l’efficacité prédictive pourrait être obtenues par plusieurs théories différentes (et donc équivalentes empiriquement – cf. le holisme examiné précédemment). Le succès d’une théorie n’est pas une marque indiscutable de sa vérité. L’auteur présente ainsi plusieurs cas de théories contemporaines, prédictivement efficaces et pourtant incompatibles : par exemple, Bohm a présenté une théorie quantique parfaitement déterministe et empiriquement équivalente à la mécanique quantique dite ‘standard’ (qui est, elle, indéterministe). De manière plus évidente, l’histoire des sciences permet un inventaire de théories scientifiques relativement efficaces et dont l’ontologie a ensuite été abandonnée. Cela ne signifie pas que l’antiréaliste affirmerait l’équivalence de n’importe quelle ontologie : selon l’antiréaliste, les scientifiques « disposent d’une marge de liberté dans l’élaboration des théories, mais non pas d’une liberté totale » (p. 153).</span></span></span></span></span></p>
<p style="margin-bottom:.0001pt; text-align:justify; margin:0cm 0cm 10pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman""><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande""><span style="color:black"> Cela clôt-il le débat ? Quelles seraient les parades réalistes à ces arguments ? Un réaliste peut considérer que la pluralité des théories est possible tant que celles-ci sont approximatives ou immatures, mais elles convergeraient vers une vérité unique. Un des enjeux est la manière d’interpréter l’histoire des sciences : doit-on voir en celle-ci une certaine continuité ? Comment interpréter les ruptures ? Peut-on y l’interpréter comme le lieu d’un progrès vers la vérité ?</span></span></span></span></span></p>
<p style="margin-bottom:.0001pt; text-align:justify; margin:0cm 0cm 10pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman""><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande""><span style="color:black"> Les termes du débat entre réalisme et anti-réalisme étant posés, l’auteur le prolonge à travers l’examen de différentes positions que l’on peut rattacher à ce débat : le phénoménisme de Mach, le réductionnisme, et surtout le conventionnalisme, notamment sous la forme modérée que propose Poincaré. On parlera de conventionnalisme modéré dans la mesure où l’idée de convention ne renvoie pas à celle d’arbitraire – notamment en ce qui concerne les axiomes de la géométrie euclidienne : ceux-ci dérivent bien en sens de l’expérience, non pas au sens où ils correspondraient au réel, mais « au sens où, étant donné la structure particulière de notre expérience, ils sont les conventions les plus commodes » (p. 166). Le raisonnement est ensuite étendu aux premières propositions de la physique, tel que le principe d’inertie.</span></span></span></span></span></p>
<p style="margin-bottom:.0001pt; text-align:justify; margin:0cm 0cm 10pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman""><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande""><span style="color:black">Le chapitre se termine par un exposé du débat dans le champ des sciences formelles : quel est notamment le statut des objets mathématiques ? Quel est le statut épistémologique des axiomes, qui semblent s’imposer à nous de manière intuitive ?</span></span></span></span></span></p>
<p style="margin-bottom:.0001pt; text-align:justify; margin:0cm 0cm 10pt"> </p>
<p style="margin-bottom:.0001pt; text-align:justify; margin:0cm 0cm 10pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman""><b><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande""><span style="color:black">Chapitre 6 : La science comme processus historique</span></span></span></b></span></span></p>
<p style="margin-bottom:.0001pt; text-align:justify; margin:0cm 0cm 10pt"> </p>
<p style="margin-bottom:.0001pt; text-align:justify; margin:0cm 0cm 10pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman""><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande""><span style="color:black"> Dans un premier temps, ce processus peut être considéré de manière continuiste ou discontinuiste. Concernant cette dernière position, comment s’opère le diagnostic de ‘révolution scientifique’ ? Une révolution scientifique implique-t-elle une prise de conscience du caractère révolutionnaire en question ? Et si oui, prise de conscience de qui ? Et comment s’opère la révolution elle-même ? Y a-t-il lieu d’envisager de ‘petites’ révolutions à côté des grandes, des révolutions locales ? Concernant la position continuiste, parle-t-on de continuité ontologique (les entités auxquelles se réfèrent les théories), ou de continuité structurale ?</span></span></span></span></span></p>
<p style="margin-bottom:.0001pt; text-align:justify; margin:0cm 0cm 10pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman""><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande""><span style="color:black">Qu’elle soit continuiste ou discontinuiste, l’évolution historique de la science est déterminée en partie par certaines contraintes, qui conditionnent l’acceptation ou le rejet d’une théorie. A noter que cette idée de contrainte englobe aussi bien des facteurs psychologiques ou sociaux que des éléments objectifs (le type de données expérimentales dont l’on dispose à une époque par exemple). Selon le type de contrainte que l’on reconnaît comme légitime, on proposera alors une histoire externaliste ou internaliste. Entre une épistémologie naïve qui nierait le poids des facteurs sociaux sur les théories, et une sociologie des sciences qui prétendrait expliquer le contenu d’une théorie par le contexte social, il existe évidemment des positions intermédiaires. L’auteur prend l’exemple de Koyré : d’une part, celui-ci montre la nécessité de prendre en compte des facteurs religieux et philosophiques pour comprendre la nouvelle astronomie élaborée par Kepler ; d’autre part, il insiste sur le fait que « la science […] a, et a toujours eu une vie propre, une histoire immanente ».</span></span></span></span></span></p>
<p style="margin-bottom:.0001pt; text-align:justify; margin:0cm 0cm 10pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman""><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande""><span style="color:black">Ces considérations nous conduisent à la question du progrès et à celle du relativisme : l’idée d’un progrès nécessaire, cumulatif, orienté vers une fin ne relève-t-elle pas d’une illusion rétrospective ? Renoncer à une telle idée ne signifie pas nécessairement renoncer à l’idée de progrès (on peut concevoir une évolution de type darwinien, qui sélectionnerait les théories les plus efficaces), mais cela pose fortement le problème du relativisme. Au sens faible celui-ci désigne la thèse selon laquelle toute connaissance est relative à certaines conditions ; au sens fort, il affirme l’impossibilité de prouver la supériorité d’une théorie par rapport à une autre, ou de la science par rapport aux autres types de croyance.</span></span></span></span></span></p>
<p style="margin-bottom:.0001pt; text-align:justify; margin:0cm 0cm 10pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman""><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande""><span style="color:black">Certes, au sens faible, le relativisme semble une position impossible à récuser, notamment en prenant en compte la critique kantienne de l’idée de connaissance absolue ; mais l’auteur prend tout de même soin de préciser les formes et les implications de cette position. De la même manière, elle introduit des distinctions au sein du relativisme fort, notamment entre relativisme des fins et des moyens. Cette distinction lui semble essentielle pour éviter un rejet « épidermique » du relativisme, qui conduirait à embrasser un « scientisme non critique ».</span></span></span></span></span></p>
<p style="margin-bottom:.0001pt; text-align:justify; margin:0cm 0cm 10pt"> </p>
<p style="margin-bottom:.0001pt; text-align:justify; margin:0cm 0cm 10pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman""><b><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande""><span style="color:black">Chapitre 7 : Bachelard et Kuhn, deux position originales et complexes</span></span></span></b></span></span></p>
<p style="margin-bottom:.0001pt; text-align:justify; margin:0cm 0cm 10pt"> </p>
<p style="margin-bottom:.0001pt; text-align:justify; margin:0cm 0cm 10pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman""><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande""><span style="color:black"> Bachelard et Kuhn sont convoqués pour illustrer la thèse de la discontinuité en histoire des sciences : pour le premier, la science progresse par ruptures, en surmontant des obstacles épistémologiques ; pour le second, la science se développe selon le schéma cyclique suivant : science normale (paradigme 1) → crise → science extra-ordinaire → révolution scientifique → science normale (paradigme 2).</span></span></span></span></span></p>
<p style="margin-bottom:.0001pt; text-align:justify; margin:0cm 0cm 10pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman""><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande""><span style="color:black"> L’auteur présente les différents composants de la notion de paradigme – un concept devenu si galvaudé qu’on ne prend souvent plus la peine de préciser qu’il ne se limite évidemment pas à des contenus théoriques : il implique des normes, un savoir-faire… Elle s’appuie sur la propre synthèse de Kuhn, dans la postface de <i>La structure des révolutions scientifiques</i>. Il y distingue quatre composantes d’un paradigme : les généralisations symboliques, la partie métaphysique (des modèles dont la portée ontologique peut être plus ou moins forte), les valeurs (qui définissent un idéal de scientificité), les exemples communs (les problèmes et solutions types).</span></span></span></span></span></p>
<p style="margin-bottom:.0001pt; text-align:justify; margin:0cm 0cm 10pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman""><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande""><span style="color:black">Après avoir explicité la signification de la thèse si fameuse de l’incommensurabilité des paradigmes, l’auteur conclut en rappelant très utilement que Kuhn s’est fermement opposé à une interprétation relativiste de son propos. Elle cite la postface de <i>La structure…</i> : « les théories scientifiques de date récente sont meilleures que celles qui les ont précédées sous l’aspect de la résolution des énigmes […]. Ce n’est pas là une position de relativiste, et elle précise en quel sens je crois fermement au progrès scientifique » (<i>La structure des révolutions scientifiques</i>, p. 279, cité p. 246)</span></span></span></span></span></p>
<p style="margin-bottom:.0001pt; text-align:justify; margin:0cm 0cm 10pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman""><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande""><span style="color:black"> Le propos est sans ambiguïté, mais cela ne nous dit pas comment concilier une telle déclaration avec la conception générale de la science défendue dans l’ouvrage et qui n’a pas été interprétée de manière relativiste sans raison ! Force est de constater que la position de Kuhn est complexe dans la mesure où il affirme que « la concurrence entre paradigmes n’est pas le genre de bataille qui puisse se gagner avec des preuves » (<i>idem</i>, p. 204, cité p. 247).</span></span></span></span></span></p>
<p style="margin-bottom:.0001pt; text-align:justify; margin:0cm 0cm 10pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman""><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande""><span style="color:black"> L’argument est finalement assez faible (comme le reconnaît l’auteur) : « la nature [des groupes scientifiques] garantit virtuellement la croissance indéfinie de la liste des problèmes résolus par la science ». Autrement dit, comme le commente l’auteur : « il repose […] entièrement sur sa confiance en la compétence de la communauté scientifique ». Une confiance qui ne va pas de soi, tant la structure précise de la communauté scientifique est complexe et variable.</span></span></span></span></span></p>
<p style="margin-bottom:.0001pt; text-align:justify; margin:0cm 0cm 10pt"> </p>
<p style="margin-bottom:.0001pt; text-align:justify; margin:0cm 0cm 10pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman""><b><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande""><span style="color:black">Chapitre 8 : la diversité des sciences</span></span></span></b></span></span></p>
<p style="margin-bottom:.0001pt; text-align:justify; margin:0cm 0cm 10pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman""><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande""><span style="color:black"> Le court chapitre 8 aborde le problème de la diversité des sciences, ou encore des épistémologies régionales. En effet, « la physique doit-elle être le modèle de toute science digne de ce nom ? » Qu’on lui accorde une valeur exemplaire ou non, il est indispensable de prendre en compte les spécificités des objets de chaque science.</span></span></span></span></span></p>
<p style="margin-bottom:.0001pt; text-align:justify; margin:0cm 0cm 10pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman""><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande""><span style="color:black">En ce qui concerne les sciences de la vie, l’auteur s’appuie sur Canguilhem pour rappeler les caractéristiques suivantes des phénomènes biologiques : les êtres vivants sont des individus, des totalités ; l’histoire du vivant est irréversible ; et observer un phénomène biologique conduit souvent à le perturber</span></span></span></span></span></p>
<p style="margin-bottom:.0001pt; text-align:justify; margin:0cm 0cm 10pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman""><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande""><span style="color:black">En ce qui concerne les sciences humaines et sociales, outre qu’il n’y a pas de méthode faisant parfaitement consensus, le problème principal est certainement celui de la non séparation du sujet et de l’objet, la difficulté pour l’homme de tenir un discours objectif sur l’homme.</span></span></span></span></span></p>
<p style="margin-bottom:.0001pt; text-align:justify; margin:0cm 0cm 10pt"> </p>
<p style="margin-bottom:.0001pt; text-align:justify; margin:0cm 0cm 10pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman""><b><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande""><span style="color:black">Chapitre 9 : orientations et enjeux de la philosophie des sciences ‘post-kuhnienne’ : le tournant pratique et la contingence</span></span></span></b></span></span></p>
<p style="margin-bottom:.0001pt; text-align:justify; margin:0cm 0cm 10pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman""><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande""><span style="color:black">L’ouvrage se clôt sur un chapitre fondé sur les recherches novatrices de l’auteur</span></span></span><a name="_ftnref1"><sup><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande""><span style="color:black">[1]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande""><span style="color:black"> et il offre donc un aperçu d’un pan de la philosophie des sciences la plus actuelle. Ce chapitre beaucoup plus dense mériterait incontestablement un compte-rendu à part. Il vise principalement à rendre compte de ce que l’on qualifie de ‘tournant pratique’ dans la philosophie des sciences et des implications de ce tournant.</span></span></span></span></span></p>
<p style="margin-bottom:.0001pt; text-align:justify; margin:0cm 0cm 10pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman""><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande""><span style="color:black">Le tournant pratique désigne la prise en compte récente des processus concrets qui produisent la science, alors que la philosophie des sciences avait jusque là tendance à s’intéresser exclusivement aux théories. L’auteur entend présenter quelques thèmes centraux des études conduites dans cette perspective, en les rattachant à ce qui lui semble être l’enjeu principal : la question de la contingence des résultats scientifiques.</span></span></span></span></span></p>
<p style="margin-bottom:.0001pt; text-align:justify; margin:0cm 0cm 10pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman""><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande""><span style="color:black">Le premier thème abordé est celui de l’hétérogénéité des déterminants : les facteurs intervenant dans le processus de la science sont beaucoup plus nombreux et complexes que ne peut le laisser penser une opposition schématique entre facteurs internes et externes. En fait, ce sont les pratiques scientifiques elles-mêmes qui s’avèrent extrêmement variables. L’auteur illustre cette affirmation en se référant au travail de Galison <i>Image and Logic</i>, qui met au jour des traditions expérimentales différentes au sein de la physique des particules. Ces traditions impliquent des normes de démonstrations également différentes, et ces différences normatives peuvent ensuite être source de conflit quand il s’agit d’interpréter ce qui a statut de fait scientifique. Le lien avec la thèse de la contingence est alors manifeste : ‘et si les traditions avaient été différentes… ?’</span></span></span></span></span></p>
<p style="margin-bottom:.0001pt; text-align:justify; margin:0cm 0cm 10pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman""><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande""><span style="color:black">Un autre thème important issu du tournant pratique est celui des aspects tacites, ou encore de l’opacité irréductible des pratiques scientifiques, un thème introduit par M. Polanyi et développé aujourd’hui notamment par H. Collins. Dans le cas des pratiques expérimentales, l’idée est que l’expérimentateur est dans l’incapacité d’expliciter toutes les conditions nécessaires à la maîtrise des protocoles expérimentaux et à l’établissement des résultats. Cette idée a des enjeux importants en ce qui concerne la reproduction expérimentale et la conservation des acquis scientifiques. Les enjeux sont particulièrement manifestes lorsque l’on a affaire à des pratiques scientifiques non stabilisées : face à un phénomène nouveau ou mal établi, quelles conclusions tirer d’un échec de la réplication ?</span></span></span></span></span></p>
<p style="margin-bottom:.0001pt; text-align:justify; margin:0cm 0cm 10pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman""><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande""><span style="color:black">Il est illusoire de penser que la réussite ou l’échec de l’expérience suffit à trancher ! Ce qu’on appelle ‘expérience’ contient en fait plusieurs ingrédients inséparables, un « pack […] protocoles-faits-experts ». Ici, une des idées les plus fortes de Collins est celle de « régression de l’expérimentateur ». Citons un extrait important de Collins lui-même : « La ‘régression de l’expérimentateur’ survient quand une série de réplications expérimentales est invoquée pour tester une affirmation controversée. Le critère habituel pour conclure qu’une expérience a été correctement conduite – à savoir l’obtention du résultat correct attendu – fait défaut, puisque ‘ce qu’est le résultat correct’ est précisément l’objet de la controverse. Du coup, les expérimentateurs peuvent discuter indéfiniment la question de savoir lequel des deux ensembles d’expériences aboutissant à des résultats conflictuels a été correctement conduit. La réponse à cette question fournit la réponse à la question de savoir quel est le résultat correct de cette expérience. Mais le seul moyen de décider quelles expériences ont été correctement conduites, c’est de décider ce qu’est le résultat correct, et de là de voir laquelle des deux expériences produit ce résultat. D’où la régression ».</span></span></span></span></span></p>
<p style="margin-bottom:.0001pt; text-align:justify; margin:0cm 0cm 10pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman""><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande""><span style="color:black">L’auteur illustre cette question à partir de l’analyse par Collins de la controverse sur les ondes gravitationnelles</span></span></span><a name="_ftnref2"><b><i><sup><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande""><span style="color:black">[2]</span></span></span></sup></i></b></a><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande""><span style="color:black">. Dans les années 70, Weber, un physicien, détecte de nouvelles ondes, à l’aide d’un dispositif expérimental tel que personne ne parvient à reproduire ses résultats. Comme dans la plupart des cas de controverse analysés par Collins, la conclusion est que la victoire d’un des camps (les adversaires de Weber) est contingente.</span></span></span></span></span></p>
<p style="margin-bottom:.0001pt; text-align:justify; margin:0cm 0cm 10pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman""><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande""><span style="color:black">Le tournant pratique permet également de donner une nouvelle dimension à la thèse dite de Duhem-Quine : alors que classiquement celle-ci s’applique à des énoncés, il s’agit maintenant de faire tenir ensemble le plus grand nombre possible d’éléments hétérogènes des pratiques scientifiques. On obtient alors une totalité où les différents éléments se soutiennent les uns les autres – une totalité que Hacking qualifie de système clos auto-justifié. Ceci nous introduit au thème de la solidité de la science, de sa stabilité, ou encore, de sa « robustesse ». Celle-ci serait compatible avec l’idée de contingence, un point absolument essentiel dans l’argumentation de l’auteur.</span></span></span></span></span></p>
<p style="margin-bottom:.0001pt; text-align:justify; margin:0cm 0cm 10pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman""><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande""><span style="color:black"> Il est temps de formuler plus précisément cette idée de contingence : il est absolument évident que les être humains, en raison de contingences historiques, auraient pu ne pas développer telle ou telle science, et donc ne pas aboutir à tel résultat. Mais le contingentisme est une thèse radicale qui n’a rien à voir avec un tel truisme : il s’agit de dire qu’à partir de conditions initiales semblables, on pourrait aboutir à une physique (par exemple) alternative tout aussi performante que notre physique, mais associée à des résultats irréductiblement différents, notamment d’un point de vue ontologique. Evaluer une thèse aussi forte est délicat : tout d’abord, que penser de la clause des conditions initiales à peu près semblables à celles de l’histoire de notre physique ? Ensuite, on peut être tenté de considérer qu’à long terme, la vérité s’imposera – aussi dans quelle temporalité nous situons-nous ? Comment évaluer la performance de cette physique alternative et la comparer à celle de notre physique ? Et comment mesurer leurs différences, leur caractère inconciliable ? Enfin, comment peut-on affirmer, comme l’auteur, que le contingentisme ne sacrifie pas la robustesse des résultats scientifiques, la rationalité et le progrès de la science ?</span></span></span></span></span></p>
<p style="margin-bottom:.0001pt; text-align:justify; margin:0cm 0cm 10pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman""><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande""><span style="color:black">Concernant cette dernière partie de l’ouvrage, comme le note l’auteur, « le réaliste qui sommeille en chacun d’entre nous » aura certainement envie de réagir</span></span></span><a name="_ftnref3"><sup><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande""><span style="color:black">[3]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande""><span style="color:black">.Quand on lit par exemple (dans une note!) que Collins s’affirme ‘contingentiste’ seulement à court terme, mais agnostique à long terme, n’est-ce pas reconnaître implicitement, que la science finit bien, au bout du compte, par établir des résultats / des théories qui auraient difficilement pu être totalement différents ?</span></span></span></span></span></p>
<p style="margin-bottom:.0001pt; text-align:justify; margin:0cm 0cm 10pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman""><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande""><span style="color:black"> La position de Hacking semble illustrer un flottement encore plus grand : l’auteur reconnaît que sa position a sans doute varié dans le temps, et il se déclare finalement inévitabiliste « à propos de certaines réponses scientifiques à des questions bien posées »</span></span></span><a name="_ftnref4"><sup><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande""><span style="color:black">[4]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande""><span style="color:black">. N’est-ce pas admettre que le contingentisme ne vaut peut-être que pour des situations où la science n’a pas encore réussi à délimiter parfaitement le problème qu’elle étudie ? Le positiviste le plus virulent ne serait-il pas d’accord ?</span></span></span></span></span></p>
<p style="margin-bottom:.0001pt; text-align:justify; margin:0cm 0cm 10pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman""><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande""><span style="color:black">Quant aux propos de Hacking concernant la robustesse de la science, ou encore la co-stabilisation des différents éléments de la pratique scientifique, cela interpelle à nouveau le réaliste : si c’est la co-stabilisation qui produit la robustesse, on peut considérer que de très nombreux systèmes de croyances / pratiques sont susceptibles de former des systèmes clos, robustes en ce sens et potentiellement irréfutables. On se demande bien ce qui fait la spécificité de la science – peut-être faudrait-il reconnaître enfin que la science est une pratique qui se préoccupe particulièrement et d’une certaine façon du réel et de la vérité.</span></span></span></span></span></p>
<p style="margin-bottom:.0001pt; text-align:justify; margin:0cm 0cm 10pt"> </p>
<p style="margin-bottom:.0001pt; text-align:justify; margin:0cm 0cm 10pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman""><b><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande""><span style="color:black">Remarques finales</span></span></span></b></span></span></p>
<p style="margin-bottom:.0001pt; text-align:justify; margin:0cm 0cm 10pt"> </p>
<p style="margin-bottom:.0001pt; text-align:justify; margin:0cm 0cm 10pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman""><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande""><span style="color:black">Ce manuel manifeste un incontestable souci pédagogique, comme en témoignent les premiers chapitres consacrés à des définitions de base (sur lesquels le lecteur quelque peu familier du domaine passera sans doute rapidement), le découpage en sections très courtes, la table des matières extrêmement détaillée, l’index fourni. Tout cela en fait un ouvrage parfaitement accessible à l’étudiant confronté à la philosophie des sciences en début de cursus.</span></span></span></span></span></p>
<p style="margin-bottom:.0001pt; text-align:justify; margin:0cm 0cm 10pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman""><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande""><span style="color:black"> De manière peut-être inévitable, des choix sont faits. L’exemple le plus frappant étant la question de la réduction, traitée de manière vraiment rapide, sans aucune référence à Hempel ou Nagel (celui-ci étant absent de l’index), sans lien avec la problématique de l’unité (vs pluralisme) des sciences. Ce thème de la réduction fait pourtant l’objet de beaucoup de recherches, par exemple dans le champ de la philosophie de la biologie</span></span></span><a name="_ftnref5"><sup><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande""><span style="color:black">[5]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande""><span style="color:black">. Ce qui peut apparaître comme une lacune permet à l’auteur de développer des thématiques plus originales, correspondant à des choix théoriques assumés comme tels : encore une fois, on ne peut que recommander la lecture du dernier chapitre, très stimulante introduction à un problème dont l’auteur regrette qu’il ne soit pas traité de manière suffisamment autonome, celui de la contingence (<i>vs</i> inévitabilité) des théories.</span></span></span></span></span></p>
<p style="margin-bottom:.0001pt; text-align:justify; margin:0cm 0cm 10pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman""><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande""><span style="color:black"> Ce chapitre accorde en outre une place importante à une perspective ‘sociologique’, souvent délaissée dans les ouvrages d’introduction à la philosophie des sciences .</span></span></span></span></span></p>
<p style="margin-bottom:.0001pt; text-align:justify; margin:0cm 0cm 10pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman""><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande""><span style="color:black"> Au final, une introduction qui comporte plusieurs niveaux de lecture et qui peut intéresser un public très varié.</span></span></span></span></span></p>
<p style="margin-bottom:.0001pt; text-align:justify; margin:0cm 0cm 10pt"> </p>
<p style="margin-bottom:.0001pt; text-align:justify; margin:0cm 0cm 10pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman""><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande""><span style="color:black">L’insistance sur ce thème de la contingence laisse transparaître une préférence assez nette de l’auteur pour une position ‘anti-réaliste’ – ce qui est évidemment parfaitement défendable. Néanmoins, on peut regretter que la position réaliste soit peut-être un peu trop rapidement identifiée à une forme de naïveté ; ou encore que la position anti-réaliste soit vue comme une résistance lucide face au ‘scientisme’ ambiant. A titre personnel, je n’ai pas l’impression de vivre dans un monde dominé par le scientisme ; je partage plutôt la consternation de P. Boghossian vis-à-vis de certaines critiques relativiste de la science (cf. P. Boghossian, <i>La peur du savoir</i>).</span></span></span></span></span></p>
<p style="margin-bottom:.0001pt; text-align:justify; margin:0cm 0cm 10pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman""><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande""><span style="color:black"> Dans sa préface, B. d’Espagnat émet quelques réserves vis-à-vis de cette prétendue « épistémologie naïve » à laquelle l’auteur fait plusieurs fois référence (cf. p. 4). Pour ma part, et c’est ma seule critique, il me semble qu’un manuel d’introduction aurait dû offrir au lecteur une présentation de la position réaliste plus consistante (on pourra comparer, pour un traitement très différent de cette position, avec le manuel de M. Esfled, <i>Philosophie des sciences</i>).</span></span></span></span></span></p>
<p align="right" style="margin-bottom:.0001pt; text-align:right; margin:0cm 0cm 10pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman""> </span></span></p>
<p align="right" style="margin-bottom:.0001pt; text-align:right; margin:0cm 0cm 10pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman""><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande"">Jonathan Racine</span></span></span></span></p>
<p style="margin-bottom:.0001pt; text-align:justify; margin:0cm 0cm 10pt"> </p>
<p style="margin-bottom:.0001pt; text-align:justify; margin:0cm 0cm 10pt"> </p>
<p style="margin-bottom:.0001pt; text-align:justify; margin:0cm 0cm 10pt"> </p>
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<p style="margin-bottom:.0001pt; text-align:justify; margin:0cm 0cm 10pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman""> </span></span></p>
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<div style="margin-bottom:.0001pt; margin:0cm 0cm 10pt">
<hr align="left" size="1" width="33%" /></div>
<p style="margin-top:0cm; margin-right:0cm; margin-bottom:.0001pt; margin-left:16.95pt; text-align:justify; margin:0cm 0cm 10pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman""><a name="_ftn1"><sup><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande""><span style="color:black">[1]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande""><span style="color:black">Cf. Lena Soler, Howard Sankey, et Paul Hoyningen-Huene, éd., <i>Rethinking scientific change and theory: stabilities, ruptures, incommensurabilities?</i>, Boston studies in the philosophy of science (Dordrecht: Springer, 2008).</span></span></span></span></span></p>
<p style="margin-top:0cm; margin-right:0cm; margin-bottom:.0001pt; margin-left:16.95pt; text-align:justify; margin:0cm 0cm 10pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman""><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande""><span style="color:black"> Lena Soler et al., éd., <i>Characterizing the robustness of science: after the practice turn in philosophy of science</i>, Boston studies in the philosophy of science, v. 292 (Dordrecht ; New York: Springer Verlag, 2012).</span></span></span></span></span></p>
<p style="margin-top:0cm; margin-right:0cm; margin-bottom:.0001pt; margin-left:16.95pt; text-align:justify; margin:0cm 0cm 10pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman""><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande""><span style="color:black"> Lena Soler, Emiliano Trizio, et Andrew Pickering, éd., <i>Science as it could have been: discussing the contingency/inevitability problem</i>(Pittsburgh, Pa: University of Pittsburgh Press, 2015).</span></span></span></span></span></p>
<p style="margin-top:0cm; margin-right:0cm; margin-bottom:.0001pt; margin-left:16.95pt; text-align:justify; margin:0cm 0cm 10pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman""><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande""><span style="color:black"> Lena Soler et al., éd., <i>Science after the practice turn in the philosophy, history, and social studies of science</i>, Routledge studies in the philosophy of science 14 (New York: Routledge, 2014).</span></span></span></span></span></p>
<p style="margin-top:0cm; margin-right:0cm; margin-bottom:.0001pt; margin-left:16.95pt; text-align:justify; margin:0cm 0cm 10pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman""><a name="_ftn2"><sup><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande""><span style="color:black">[2]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande""><span style="color:black">Le lecteur francophone peut se référer par exemple au texte de Collins sur les ondes gravitationnelles dans l’anthologie de Callon et Latour <i>La science telle qu’elle se fait. </i>Le sujet est également abordé dans le petit livre très provocateur de Collins et Pinch, <i>Tout ce que vous devriez savoir sur la science</i>. Le compte-rendu critique de cet ouvrage par Morange permet de prendre quelques distances avec cette approche : « Harry Collins, Trevor Pinch, Tout ce que vous devriez savoir sur la science », <i>Revue d’histoire des sciences</i>, 1997, 379‑81. Concernant la controverse des ondes gravitationnelles, Morange n’hésite pas à parler de malhonnêteté de la part de Collins : « nul ne niait qu'il existât des ondes gravitationnelles : le seul problème était de savoir si les expériences de Joseph Weber détectaient ces ondes gravitationnelles ou des artefacts ». (On notera que Lena Soler distingue soigneusement les deux questions : cf. p. 293)</span></span></span></span></span></p>
<p style="margin-top:0cm; margin-right:0cm; margin-bottom:.0001pt; margin-left:16.95pt; text-align:justify; margin:0cm 0cm 10pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman""><a name="_ftn3"><sup><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande""><span style="color:black">[3]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande""><span style="color:black">Néanmoins, tout comme l’auteur nous semble exagérer le poids du ‘scientisme’ dans le champ intellectuel, elle néglige peut-être inversement le poids du relativisme qui sommeille chez beaucoup d’entre nous.</span></span></span></span></span></p>
<p style="margin-top:0cm; margin-right:0cm; margin-bottom:.0001pt; margin-left:16.95pt; text-align:justify; margin:0cm 0cm 10pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman""><a name="_ftn4"><sup><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande""><span style="color:black">[4]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande""><span style="color:black">Concernant Hacking, on peut se référer au chapitre 3 de <i>La construction sociale de quoi ?</i> L’auteur conclut sur son « ambivalence » concernant la thèse constructionniste à l’égard des sciences de la nature. Ce texte illustre à mon sens les contorsions peu satisfaisantes auxquelles on est conduit lorsque l’on accorde d’abord beaucoup à la thèse constructionniste, sans vouloir assumer certaines conséquences relativistes.</span></span></span></span></span></p>
<p style="margin-top:0cm; margin-right:0cm; margin-bottom:.0001pt; margin-left:16.95pt; text-align:justify; margin:0cm 0cm 10pt"><span style="font-size:12pt"><span style="font-family:"Times New Roman""><a name="_ftn5"><sup><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande""><span style="color:black">[5]</span></span></span></sup></a><span style="font-size:11.0pt"><span style="font-family:"Lucida Grande""><span style="color:black">Cf. par exemple Rosenberg, <i>Darwinian Reductionism </i>; Sachse, <i>Philosophie de la biologie </i>; Kaiser, <i>Reductive Explanation in the Biological Sciences</i>...</span></span></span></span></span></p>
<p style="margin:0cm 0cm 10pt"> </p>Guillaume Carnino L’invention de la science. La nouvelle religion de l’âge industriel, Seuil « L’univers historique » 2015 Lu par Alexandre Kleinurn:md5:44a0ebb23c5aca87b6ede8d66c4c8cf82016-10-14T19:40:00+02:002016-10-18T17:10:27+02:00Florence BenamouÉpistémologieHistoireidéologiescienceTechnoscience<p><strong>Guillaume Carnino L’invention de la science. La nouvelle religion de l’âge industriel, Seuil « L’univers historique » 2015 Lu par Alexandre Klein</strong></p>
<p style="text-align: justify;">Quand et comment « la science » s’est-elle imposée, en France, comme l’unique garant du vrai et par là même comme une référence sociale et culturelle centrale, voire même sacrée ? C’est à cette question que l’historien Guillaume Carnino tente de répondre dans son dernier ouvrage, issu d’une thèse de doctorat soutenue en 2011 sous la direction de Dominique Pestre. Il ne s’agit pas là d’une énième histoire des sciences modernes, retrouvant dans les travaux de Bacon, Descartes ou Galilée l’apparition d’un nouvel esprit scientifique et des fondements de notre <img alt="http://t0.gstatic.com/images?q=tbn:ANd9GcQ756EmF3VeTkQBLidUexdOZxLqCn_W1HBjGTUShfatJAbpjrZqaRv_FvNg" src="http://t0.gstatic.com/images?q=tbn:ANd9GcQ756EmF3VeTkQBLidUexdOZxLqCn_W1HBjGTUShfatJAbpjrZqaRv_FvNg" style="float: left; margin: 4px;" />modernité. L’auteur préfère ici retourner l’interrogation sur les origines de la science moderne en analysant « les origines modernes de la science », et ce afin d’identifier le « moment précis où des pratiques préexistantes […] en viennent à être subsumées sous le vocable de science au singulier » (p. 12). Autrement dit, il se demande quand on a commencé à parler de « la science » et de quelle manière cette expression est devenue synonyme de vérité ? Pour mener à bien son enquête, il sollicite des sources diverses, allant des fonds d’archives d’institutions scientifiques françaises de renom aux correspondances de savants, en passant par des revues et des publications populaires. Son étude se divise en quatre grandes parties abordant respectivement l’avènement de « la science », son rôle de nouvelle autorité publique, ses rapports avec l’industrie et enfin son implication politique dans l’avènement de la III<sup>e</sup> République.</p> <p style="text-align: justify;">Afin de mettre en évidence la manière dont l’idée de science s’est progressivement solidifiée au cours du premier XIX<sup>e</sup> siècle, l’auteur s’attache tout d’abord à montrer comment le sens du mot « science » a basculé en France entre 1800 et 1860, passant d’un terme commun renvoyant au savoir en général à l’idée d’une connaissance certaine car rationnelle et expérimentale apparaissant alors de plus en plus dans les titres des publications imprimées. La transformation de l’image de Galilée, de génie romantique à véritable fondateur et incarnation de la science moderne, qu’il retrace ensuite, semble confirmer cette invention sémantique. À l’aune de l’historiographie galiléenne se fait en effet jour le changement de statut de la notion de science, ainsi que sa progressive généralisation, après 1840, comme à la fois une activité renvoyant à des pratiques, une vision du monde et une épistémologie. </p>
<p style="text-align: justify;">Mais cet avènement de l’idée de science au singulier, dont témoignent les titres des publications du premier XIX<sup>e</sup> siècle autant que les débats autour de la figure de du savant italien, relève aussi de dynamiques propres à l’époque et notamment de la nécessité d’une nouvelle autorité publique pour arbitrer les débats nombreux qui agitent une société française en proie à des tensions et des bouleversements politiques récurrents. La cristallisation qui s’opère autour de « la science » s’inscrit en effet dans un contexte où les enjeux savants deviennent un lieu d’opposition entre politique et religion. Les débats autour de la pensée de Darwin, de l’invention de la préhistoire ou de la génération spontanée témoignent du rôle nouveau qui va être accordé à la science pour dépasser des querelles politiques et sociales aux enjeux théologiques forts. En s’opposant radicalement à la religion, la science acquiert une force nouvelle, mais surtout une aura sans égal qui ne va pas tarder à gagner l’ensemble de la société. Il faut dire que l’émergence de la science populaire - ancêtre de la vulgarisation scientifique -, l’appropriation de la science par les arts - dont les récits de Jules Verne sont les plus célèbres exemples-, ou encore les expositions universelles vont permettre de vulgariser et de populariser cette science à qui on prête désormais toutes les vertus. On voit d’ailleurs grandir, dans la seconde moitié du XIX<sup>e</sup> siècle, le nombre d’étudiants dans les universités qui, notamment après la défaite de 1870, trouvent dans le modèle de la science « pure » la justification de leur autonomie, de leur croissance, ainsi que de leur importance sociale et politique. Il faut de la recherche fondamentale pour mieux développer des applications qui serviront ensuite à toute la société. C’est à ce titre et dans ces circonstances que la science va devenir l’allié et le support de l’industrie. </p>
<p style="text-align: justify;">La valorisation de la science n’est en effet pas sans rapport avec la forte croissance industrielle que connaît la France au cours du Second Empire. L’investissement de l’État dans la formation des ingénieurs, notamment dans la seconde moitié du siècle, va favoriser à la fois le dynamisme de l’industrie et l’affirmation de la science comme moteur de l’invention et de la production. Deux personnages seront au cœur de cette évolution : Jean-Baptiste Dumas, créateur de l’École centrale et Louis Pasteur qui consacra une grande partie de sa carrière à résoudre les problèmes des industriels qu’ils soient brasseurs ou agronomes. Cette alliance nouvelle de la science et de l’industrie, visible dans le milieu brassicole ou l’invention de la pisciculture, va engager une transformation de la notion de technologie. Elle fait en effet poindre l’idée contemporaine de la technoscience où la <em>techno-logie</em> n’est plus dissertation sur les arts, mais science au service de la production, et où science, industrie et pouvoirs politiques sont irrémédiablement liés. Ainsi, si l’industrialisation qui marque la France du XIX<sup>e</sup> siècle repose en grande partie sur le déploiement de la science, elle ne manque pas d’assurer en retour la valorisation et la reconnaissance sociales et politiques de l’immense pouvoir de cette dernière. Peu à peu, la science va même s’imposer comme une véritable religion au sein de la société et de l’État français. </p>
<p style="text-align: justify;">Après 1860, on voit en effet se développer la dimension religieuse de la science qui est désormais considérée comme l’unique moteur du progrès. « À la fois héritière et concurrente du christianisme, la science apparaît comme une <em>nouvelle foi</em> » (p. 207). Ce nouveau discours eschatologique se construit notamment autour de la figure de l’ingénieur martyr, mort pour le progrès de la science et donc le bien de tous. On crée même en 1857 une Société de secours des amis des sciences qui « visent à aider les veuves et les orphelins d’inventeurs et scientifiques trop passionnés par leur noble mission pour se préoccuper de leurs proches » (p. 219). La puissance de ces nouvelles représentations mythologiques relatives à la science et à l’idéologie du progrès est si forte dans la France du second XIX<sup>e</sup> siècle que toute résistance apparaît alors, comme dans le cas du débat sur des déversements de Gennevilliers étudiés par l’auteur, comme « une crispation futile engendrée par l’aveuglement obscurantiste de privilégiés jaloux de leurs prérogatives » (p. 220). La science est devenue l’argument de toutes les batailles, qu’elles soient scientifiques et environnementales ou sociales et politiques. La III<sup>e</sup> République qui voit le jour en 1870 ne va d’ailleurs pas manquer de s’appuyer sur ce dogme nouveau qui fait de la science le socle spirituel des sociétés ainsi que le moteur du mouvement naturel de l’humanité. Dans la lignée du positivisme comtien, Émile Littré ou Jules Ferry vont être de ceux qui valorisent la science comme fondement sur lequel la stabilité sociale et l’égalité républicaine peuvent et doivent se déployer, accordant définitivement à la science un rôle politique de premier choix.</p>
<p style="text-align: justify;">Mais si l’avènement, au cours du XIX<sup>e</sup> siècle, de la science comme unique garant de la vérité et principal moteur de transformation du réel a conduit à la création d’une mythologie scientifique puissante, cette dernière a, comme le précise Carnino en conclusion, des conséquences contradictoires. En devenant un outil politique de choix, notamment grâce à sa dimension religieuse, la science s’est, de manière paradoxale, exclue du champ politique. À mesure qu’il s’imposait comme un acteur incontournable des affaires publiques, garant de l’objectivité et de la neutralité du jugement, l’expert scientifique validait en effet la sortie de son champ d’expertise de la sphère démocratique. La science n’est pas objet de débat politique. En utilisant la science pour fonder légitimement leur pouvoir, les nouveaux gouvernants du XIX<sup>e</sup> siècle ont paradoxalement réduit le champ de leur propre action politique et donc affaibli leur pouvoir. C’est cette conception contradictoire de la science, tout à la fois fondement de l’ordre et de la liberté, dont nous avons, sans véritablement nous en rendre compte, hérité.</p>
<p style="text-align: justify;">Ainsi, en voulant étudier l’historicité de la notion de science, Guillaume Carnino est finalement parvenu à mettre en évidence les ressorts historiques et grandement idéologiques sur lesquels repose la puissance symbolique et sociopolitique majeure qui est aujourd’hui celle de la science. Sa recherche de l’invention moderne de la science l’a conduit à produire une véritable anthropologie historique de notre rapport au scientifique. Car c’est finalement un état d’esprit, une attitude, une mentalité que Carnino met en évidence : celle qui liait les Français à la science au cours du XIX<sup>e</sup> siècle et qui caractérise toujours le rapport de l’Occident au domaine scientifique. Ce sujet aussi essentiel qu’il est difficile à cerner l’a contraint à multiplier les points de vue, à varier les objets d’études, au point que le lecteur ait parfois le sentiment d’une diversité le faisant sauter sans préavis d’une thématique à une autre, d’un objet à un autre. Pour autant, on est très loin de la collection désunie d’études diverses. En effet, au milieu de la variété des objets se dessine une unité certaine que l’auteur parvient aisément à faire émerger et à travailler en tant qu’objet propre. De même, s’il est contraint de parcourir certains sujets à grands pas, Carnino évite toujours les excès de la simplification. Sa démonstration du « jeu de dupes ayant accouché de la science » (p. 269) se fait avec une justesse et une prudence qui lui évitent de tomber dans la caricature comme c’est trop souvent le cas dans les études sur les ressorts idéologiques de la puissance scientifique. <em>In fine</em>, Carnino nous offre ici une étude intéressante, habile et pertinente qui témoigne une fois encore de la richesse des interactions entre l’histoire des sciences et l’histoire sociale et culturelle. </p>
<p style="text-align: justify;"> </p>
<p style="text-align: justify;"> </p>
<p style="text-align: justify;"> Alexandre Klein</p>Jean-Yves Bory, La douleur des bêtes, la polémique sur la vivisection au XIXe siècle en France, PUR, octobre 2013, lu par Laurence Harangurn:md5:7e35f71ee5162cf71ef2b5f771aba0412013-12-18T06:00:00+01:002013-12-18T06:00:00+01:00Cyril MoranaÉthiqueabolitionnismedroits des animauxexpérimentationféminismeprogrèssciencevivisection<p class="MsoNormal" style="margin-bottom:12.0pt;text-align:justify;text-justify:
inter-ideograph;mso-pagination:none;mso-layout-grid-align:none;text-autospace:
none"><strong><span lang="EN-US" style="font-size:10.0pt;font-family:"Lucida Grande";
mso-ansi-language:EN-US"><img src="http://blog.ac-versailles.fr/oeildeminerve/public/decembre/.douleur_t.jpg" alt="" title="douleur.png, déc. 2013" style="float: left; margin: 0 1em 1em 0;" />Jean-Yves Bory, <em>La douleur des bêtes, la polémique sur
la vivisection au XIXe siècle en France</em>, PUR, octobre 2013. </span></strong></p>
<p>
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<p class="MsoNormal" style="text-align:justify;text-justify:inter-ideograph"><span lang="EN-US" style="font-size:10.0pt;font-family:"Lucida Grande";mso-ansi-language:
EN-US">La vivisection au XIXe siècle fut pratiquée avec frénésie :
ainsi, des exercices chirurgicaux furent opérés sur des chevaux vivants, des
bœufs, des mulets, des porcs. Rien ne fut épargné aux animaux - des incisions,
des ponctions, des ligatures, des saignées durant des heures entières - entre
les mains d’élèves destinés à devenir des praticiens. D’autres expériences
d’une rare cruauté consistaient à couper ou arracher les nerfs des
lapins, des chiens…En outre, les cris des animaux, loin de susciter la
compassion des vivisecteurs, donnaient de précieuses informations aux
praticiens.</span></p> <p class="MsoNormal" style="margin-bottom:12.0pt;text-align:justify;text-justify:
inter-ideograph;mso-pagination:none;mso-layout-grid-align:none;text-autospace:
none"><span lang="EN-US" style="font-size:10.0pt;font-family:"Lucida Grande";
mso-ansi-language:EN-US">Il est curieux que le terme » vivisection »
n’ai pas été employé au XVIIIe siècle ; tout au plus, cette pratique
scientifique fut-elle considérée comme une partie de la dissection, « une
anatomie en mouvement ». C’est au XIXe siècle qu’elle est définie
comme « une expérience faite sur les animaux vivants à l’effet
d’arriver à déterminer les propriétés des tissus et des humeurs ou les usages
des organes ». Puis au XIXe siècle, dans le « Grand dictionnaire du
XIXe siècle », les explications sont plus détaillées : la vivisection
comprend « les mutilations, incisions, excisions, ablations, injections,
sections faites dans le but de pénétrer le mécanisme des fonctions de la
vie. » La vivisection n’est donc pas seulement une méthode mais un
véritable paradigme. En effet, cette pratique médicale regroupe une communauté
de chercheurs ; en ce sens, la vivisection constitue une lutte pour
la domination.</span></p>
<p class="MsoNormal" style="margin-bottom:12.0pt;text-align:justify;text-justify:
inter-ideograph;mso-pagination:none;mso-layout-grid-align:none;text-autospace:
none"><span lang="EN-US" style="font-size:10.0pt;font-family:"Lucida Grande";
mso-ansi-language:EN-US"> Jean-Yves Bory, dans <em>La douleur des bêtes,
la polémique sur la vivisection au XIXe siècle en France</em>, se propose de
faire « l’anatomie d’une polémique ». La vivisection fut en effet un
sujet polémique car elle opposait les partisans de l’utilité à ceux qui dénonçaient
par compassion les souffrances infligées aux animaux. Il faut donc se demander
pourquoi la vivisection a été pratiquée avec une telle intensité au XIXe siècle
et pourquoi elle a été contestée. « Faire l’anatomie d’une
polémique », c’est aussi prendre au sérieux le discours et le combat des
antivivisectionnistes contre la cruauté de la vivisection. D’après l’auteur, la
France a créé le paradigme de la vivisection. C’est à travers des documents de
l’école vétérinaire d’Alfort, des périodiques scientifiques et médicaux, des
pamphlets des antivivisectionnistes que l’auteur entend retracer l’histoire
mouvementée et polémique de la vivisection. Pour autant, peut-on affirmer que
le combat contre la vivisection fut un combat contre la science ? Jean-Yves
Bory avance quatre hypothèses déterminantes :</span></p>
<p class="MsoNormal" style="margin-bottom:12.0pt;text-align:justify;text-justify:
inter-ideograph;mso-pagination:none;mso-layout-grid-align:none;text-autospace:
none"><span lang="EN-US" style="font-size:10.0pt;font-family:"Lucida Grande";
mso-ansi-language:EN-US">a) La polémique sur la
vivisection fut une polémique sur les animaux et non sur la science</span></p>
<p class="MsoNormal" style="margin-bottom:12.0pt;text-align:justify;text-justify:
inter-ideograph;mso-pagination:none;mso-layout-grid-align:none;text-autospace:
none"><span lang="EN-US" style="font-size:10.0pt;font-family:"Lucida Grande";
mso-ansi-language:EN-US">b) Il est faux de considérer que les
médecins et praticiens furent intelligents et rationnels tandis que d’autres
acteurs seraient irrationnels et obscurs</span></p>
<p class="MsoNormal" style="margin-bottom:12.0pt;text-align:justify;text-justify:
inter-ideograph;mso-pagination:none;mso-layout-grid-align:none;text-autospace:
none"><span lang="EN-US" style="font-size:10.0pt;font-family:"Lucida Grande";
mso-ansi-language:EN-US">c) La vivisection n’a pas été
acceptée parce qu’elle a été efficace mais c’est parce qu’elle a été acceptée
qu’elle est considérée comme efficace</span></p>
<p class="MsoNormal" style="margin-bottom:12.0pt;text-align:justify;text-justify:
inter-ideograph;mso-pagination:none;mso-layout-grid-align:none;text-autospace:
none"><span lang="EN-US" style="font-size:10.0pt;font-family:"Lucida Grande";
mso-ansi-language:EN-US">d) La polémique sur la vivisection a
mis en place un ensemble de rapports sociaux ; notamment le paradigme de
l’expérimentation animale et à l’opposé celui de la défense animale</span></p>
<p class="MsoNormal" style="margin-bottom:12.0pt;text-align:justify;text-justify:
inter-ideograph;mso-pagination:none;mso-layout-grid-align:none;text-autospace:
none"><span lang="EN-US" style="font-size:10.0pt;font-family:"Lucida Grande";
mso-ansi-language:EN-US"> <img src="http://blog.ac-versailles.fr/oeildeminerve/public/decembre/Capture_d_ecran_2013-12-08_a_18.15.50.png" alt="" title="Capture_d_ecran_2013-12-08_a_18.15.50.png, déc. 2013" style="float: right; margin: 0 0 1em 1em;" /></span></p>
<p class="MsoNormal" style="margin-bottom:12.0pt;text-align:justify;text-justify:
inter-ideograph;mso-pagination:none;mso-layout-grid-align:none;text-autospace:
none"><span lang="EN-US" style="font-size:10.0pt;font-family:"Lucida Grande";
mso-ansi-language:EN-US"> </span></p>
<p class="MsoNormal" style="margin-bottom:12.0pt;text-align:justify;text-justify:
inter-ideograph;mso-pagination:none;mso-layout-grid-align:none;text-autospace:
none"><span lang="EN-US" style="font-size:10.0pt;font-family:"Lucida Grande";
mso-ansi-language:EN-US">La question centrale revient à se demander
« comment des êtres normalement constitués peuvent-ils passer leurs
journées à torturer des animaux ? » Le triomphe de la méthode
expérimentale va de pair avec le développement du capitalisme au XIXe siècle,
de l’exploitation de l’être vulnérable qu’il soit un ouvrier, un exclu ou un animal :</span></p>
<p class="MsoNormal" style="margin-bottom:12.0pt;text-align:justify;text-justify:
inter-ideograph;mso-pagination:none;mso-layout-grid-align:none;text-autospace:
none"><em><span lang="EN-US" style="font-size:10.0pt;font-family:"Lucida Grande";
mso-ansi-language:EN-US">« La base de ce développement a été une idéologie
du progrès, la croyance au bonheur de l’humanité apporté par la raison. Le
positivisme, le scientisme ont triomphé, associant les sciences à une
entreprise de régénération de l’homme. » (P21)</span></em></p>
<p class="MsoNormal" style="margin-bottom:12.0pt;text-align:justify;text-justify:
inter-ideograph;mso-pagination:none;mso-layout-grid-align:none;text-autospace:
none"><span lang="EN-US" style="font-size:10.0pt;font-family:"Lucida Grande";
mso-ansi-language:EN-US"> <strong>Plan de l’ouvrage :</strong></span></p>
<p class="MsoNormal" style="margin-bottom:12.0pt;text-align:justify;text-justify:
inter-ideograph;mso-pagination:none;mso-layout-grid-align:none;text-autospace:
none"><span lang="EN-US" style="font-size:10.0pt;font-family:"Lucida Grande";
mso-ansi-language:EN-US">Le livre se divise en deux grandes parties :</span></p>
<p class="MsoNormal" style="margin-bottom:12.0pt;text-align:justify;text-justify:
inter-ideograph;mso-pagination:none;mso-layout-grid-align:none;text-autospace:
none"><span lang="EN-US" style="font-size:10.0pt;font-family:"Lucida Grande";
mso-ansi-language:EN-US">- la 1<sup>ère</sup>
partie constitue une étude de la période antérieure à 1880 (chapitre I à IV).</span></p>
<p class="MsoNormal" style="margin-bottom:12.0pt;text-align:justify;text-justify:
inter-ideograph;mso-pagination:none;mso-layout-grid-align:none;text-autospace:
none"><span lang="EN-US" style="font-size:10.0pt;font-family:"Lucida Grande";
mso-ansi-language:EN-US">- la 2<sup>ème</sup>
partie consiste en une analyse du mouvement antivivisectionniste (chapitre V à
VIII).</span></p>
<p class="MsoNormal" style="margin-bottom:12.0pt;text-align:justify;text-justify:
inter-ideograph;mso-pagination:none;mso-layout-grid-align:none;text-autospace:
none"><span lang="EN-US" style="font-size:10.0pt;font-family:"Lucida Grande";
mso-ansi-language:EN-US"> </span></p>
<p class="MsoNormal" style="margin-bottom:12.0pt;text-align:justify;text-justify:
inter-ideograph;mso-pagination:none;mso-layout-grid-align:none;text-autospace:
none"><span lang="EN-US" style="font-size:10.0pt;font-family:"Lucida Grande";
mso-ansi-language:EN-US"> <strong>Première partie : le paradigme de la
vivisection</strong></span></p>
<p class="MsoNormal" style="margin-bottom:12.0pt;text-align:justify;text-justify:
inter-ideograph;mso-pagination:none;mso-layout-grid-align:none;text-autospace:
none"><span lang="EN-US" style="font-size:10.0pt;font-family:"Lucida Grande";
mso-ansi-language:EN-US"> Le triomphe de la vivisection au XIXe siècle
s’explique principalement par le souci de rationaliser la démarche
expérimentale. C’est pourquoi la vivisection devient la norme de la
physiologie. Il ne faudrait pas pour autant penser que cette pratique médicale
se limite aux seuls « savants » comme Bernard et Magendie. Bien au
contraire, les écoles vétérinaires, les écoles de médecine, la chirurgie font
un usage frénétique de la vivisection. Car la physiologie a pour but de faire
avancer la médecine des animaux et donc celle des hommes. Au nom d’une
idéologie du progrès issue des Lumières, on fait de la science la condition de
toute émancipation. De ce fait, l’Empire encourage les recherches dans le
domaine des sciences physico-chimiques à des fins militaires. Dans les années
1830, la physiologie s’institutionnalise : Magendie obtient une chaire au
Collège de France, Flourens un poste au Museum, Bernard et Lasègue ouvrent un
laboratoire en 1840. Dès lors, le mot d’ordre « instituer une
expérience » constitue un objet de foi sans aucune considération pour
l’animal éventré ou auquel on a passé un clou dans la trachée-artère pour
éviter qu’il ne crie. Certaines pratiques de la vivisection avaient pour
finalité de pénétrer le secret de la vie par la section des fonctions
organiques ; ainsi Magendie coupait les racines nerveuses de la moelle
épinière à des chiots pour distinguer les racines motrices des racines
sensitives !</span></p>
<p class="MsoNormal" style="margin-bottom:12.0pt;text-align:justify;text-justify:
inter-ideograph;mso-pagination:none;mso-layout-grid-align:none;text-autospace:
none"><span lang="EN-US" style="font-size:10.0pt;font-family:"Lucida Grande";
mso-ansi-language:EN-US"> L’animal n’est qu’un objet pour les
vivisecteurs - « matière, donc matière à expérimentation » (P37). Les
vivisecteurs partageaient les mêmes croyances selon lesquelles un être vivant
n’avait pas de spécificité propre, d’où le rejet de toute croyance relative au
vitalisme au profit du matérialisme. Cette confiance en la science s’affirmait
dans la foi en l’expérimentation. A cet égard, la science selon Bernard est une
croyance : l’expérimentation sur le vivant garantit une base scientifique
à la médecine. Fort de sa notoriété, Bernard, dans <em>L’introduction à l’étude
de la méthode expérimentale, </em>exige le « droit d’une manière
entière et absolue » de faire des vivisections sur les animaux. Il est
évident selon le physiologiste que les « cris de sensibilité » de
« gens du monde » ne sont rien au regard des exigences de la
science :</span></p>
<p class="MsoNormal" style="margin-bottom:12.0pt;text-align:justify;text-justify:
inter-ideograph;mso-pagination:none;mso-layout-grid-align:none;text-autospace:
none"><em><span lang="EN-US" style="font-size:10.0pt;font-family:"Lucida Grande";
mso-ansi-language:EN-US">« Le physiologiste n’est pas un homme du monde,
c’est un savant, c’est un homme qui est saisi et absorbé par une idée
scientifique qu’il poursuit : il n’entend plus les cris des animaux, il ne
voit plus le sang qui coule, il ne voit que son idée et n’aperçoit que des
organismes qui lui cachent des problèmes qu’il veut découvrir. »</span></em></p>
<p class="MsoNormal" style="margin-bottom:12.0pt;text-align:justify;text-justify:
inter-ideograph;mso-pagination:none;mso-layout-grid-align:none;text-autospace:
none"><span lang="EN-US" style="font-size:10.0pt;font-family:"Lucida Grande";
mso-ansi-language:EN-US"> </span></p>
<p class="MsoNormal" style="margin-bottom:12.0pt;text-align:justify;text-justify:
inter-ideograph;mso-pagination:none;mso-layout-grid-align:none;text-autospace:
none"><span lang="EN-US" style="font-size:10.0pt;font-family:"Lucida Grande";
mso-ansi-language:EN-US">Ainsi, il n’est pas immoral selon les vivisecteurs de
faire des expériences sur les animaux si elles sont utiles à l’homme. Dès lors,
la science devient incontestable par la force de ses expérimentations.</span></p>
<p class="MsoNormal" style="margin-bottom:12.0pt;text-align:justify;text-justify:
inter-ideograph;mso-pagination:none;mso-layout-grid-align:none;text-autospace:
none"><span lang="EN-US" style="font-size:10.0pt;font-family:"Lucida Grande";
mso-ansi-language:EN-US">Pourtant des polémiques eurent lieu dans les années
1820-1840 à l’Académie de médecine quant à la valeur scientifique des
expérimentations. La contestation menée principalement par l’académicien et
professeur Gerdy portait sur l’incertitude et la contradiction des résultats
(notamment l’analogie biologique entre l’homme et l’animal). Avec raison,
Gerdy s’interroge sur l’exigence de vérité des vivisecteurs : la foi
des scientifiques ne serait-elle pas l’alibi de leur désir de gloire et de
reconnaissance ? Sans entrer dans le détail de ces contestations, on peut
remarquer que la pratique de la vivisection apportait une grande renommée aux
savants :</span></p>
<p class="MsoNormal" style="margin-bottom:12.0pt;text-align:justify;text-justify:
inter-ideograph;mso-pagination:none;mso-layout-grid-align:none;text-autospace:
none"><span lang="EN-US" style="font-size:10.0pt;font-family:"Lucida Grande";
mso-ansi-language:EN-US">« <em>L’ambition, la rivalité entre écoles, la
production de données utiles uniquement en interne, pour la science et non pour
la société, sont au fondement de cette critique. La vivisection alimente le
travail d’un corps professionnel, sert aux vivisecteurs et à eux seulement, à
leur carrière. » (P 63).</em></span></p>
<p class="MsoNormal" style="margin-bottom:12.0pt;text-align:justify;text-justify:
inter-ideograph;mso-pagination:none;mso-layout-grid-align:none;text-autospace:
none"><span lang="EN-US" style="font-size:10.0pt;font-family:"Lucida Grande";
mso-ansi-language:EN-US">La polémique à propos de la souffrance des animaux a
toujours été virulente au cours du siècle. Des médecins modérés condamnent la
vivisection pour son inutilité et sa cruauté ; le philosophe Auguste Comte
quant à lui refuse que les hommes aient des « droits absolument
illimités » sur les animaux et s’inquiète des conséquences sur la jeunesse
de ce spectacle de la cruauté.</span></p>
<p class="MsoNormal" style="margin-bottom:12.0pt;text-align:justify;text-justify:
inter-ideograph;mso-pagination:none;mso-layout-grid-align:none;text-autospace:
none"><span lang="EN-US" style="font-size:10.0pt;font-family:"Lucida Grande";
mso-ansi-language:EN-US"> </span></p>
<p class="MsoNormal" style="margin-bottom:12.0pt;text-align:justify;text-justify:
inter-ideograph;mso-pagination:none;mso-layout-grid-align:none;text-autospace:
none"><strong><span lang="EN-US" style="font-size:10.0pt;font-family:"Lucida Grande";
mso-ansi-language:EN-US">Deuxième partie : le mouvement
antivivisectionniste :</span></strong></p>
<p class="MsoNormal" style="margin-bottom:12.0pt;text-align:justify;text-justify:
inter-ideograph;mso-pagination:none;mso-layout-grid-align:none;text-autospace:
none"><span lang="EN-US" style="font-size:10.0pt;font-family:"Lucida Grande";
mso-ansi-language:EN-US">Force est de constater que les antivivisectionnistes
au XIXe siècle regroupent des féministes, des progressistes et de grands
défenseurs des causes humaines et animales – Victor Hugo et Victor Schoelcher.
Le combat des antivivisectionnistes est politique : c’est en ce sens un
mouvement progressiste et animé d’un souci de justice sociale. La lutte contre
la vivisection s’accompagne chez les féministes anglaises de la critique de
l’autorité masculine, notamment dans le domaine médical. En effet, les
vivisecteurs sont en majorité des hommes fiers de leur pouvoir. Or, les féministes
entendent faire de leur combat contre la vivisection une lutte pour la
justice et l’égalité. C’est ainsi que Kingsford bouleverse les mœurs de son
temps par ses études de médecine et son refus de faire de la vivisection un
art ! Ces femmes, loin des conventions sociales admises, se montrent
déterminées et inventives dans leurs actions et leurs prises de position :
Marie Huot n’hésite pas à perturber au Collège de France en 1883 une
démonstration sur un petit singe de Brown- Séquard (successeur de Claude
Bernard). La Ligue antivivisectionniste à laquelle adhère Huot entretient des
rapports très étroits avec les anarchistes comme Louise Michel et les
féministes révolutionnaires, les socialistes. En effet, la lutte contre la
vivisection est une lutte contre l’esclavage, qu’elle résulte de l’exploitation
des prolétaires ou des animaux ! C’est pourquoi la Ligue
antivivisectionniste est abolitionniste puisqu’elle s’oppose à l’existence de
la vivisection comme de toute forme d’esclavage. D’autre part, des liens
étroits existent entre la lutte contre la vivisection et la société de
théosophie : Anna Kingsford entretient des relations étroites avec Helena
Petrovna Blavatsky. La société de théosophie est une organisation
internationale ayant pour but de défendre la fraternité universelle. La vision
philosophique de la théosophie est donc compatible avec le respect de la
nature, de la vie animale. C’est pourquoi la lutte contre la vivisection
participe d’un respect pour les êtres. Mais il faut bien remarquer une opposition
fondamentale entre une science utilitariste et une philosophie
spiritualiste : c’est ainsi qu’Anna Kingsford refuse la séparation de
l’homme avec d’autres espèces au nom d’un principe philosophique. La ligue
antivivisectionniste s’impose par son radicalisme et ses militants n’hésitent
pas à s’infiltrer dans les laboratoires, dans les conférences afin de perturber
les cours des médecins. Il semble nécessaire de gagner le public à sa
cause ; car les scientifiques ont tendance à nier la souffrance animale
lors des expérimentations. D’ailleurs les vivisecteurs donnent une image
caricaturale des défenseurs de la cause animale : les militants sont
souvent considérés comme des hystériques ou des êtres dotés d’une sensibilité
exacerbée. Les vivisecteurs justifient le sacrifice
de quelques animaux pour le bien-être de tous alors que les
antivivisectionnistes mettent en avant l’inutilité de cet
« art ».</span></p>
<p class="MsoNormal" style="margin-bottom:12.0pt;text-align:justify;text-justify:
inter-ideograph;mso-pagination:none;mso-layout-grid-align:none;text-autospace:
none"><span lang="EN-US" style="font-size:10.0pt;font-family:"Lucida Grande";
mso-ansi-language:EN-US"> </span></p>
<p class="MsoNormal" style="margin-bottom:12.0pt;text-align:justify;text-justify:
inter-ideograph;mso-pagination:none;mso-layout-grid-align:none;text-autospace:
none"><strong><span lang="EN-US" style="font-size:10.0pt;font-family:"Lucida Grande";
mso-ansi-language:EN-US">Conclusion</span></strong></p>
<p class="MsoNormal" style="margin-bottom:12.0pt;text-align:justify;text-justify:
inter-ideograph;mso-pagination:none;mso-layout-grid-align:none;text-autospace:
none"><span lang="EN-US" style="font-size:10.0pt;font-family:"Lucida Grande";
mso-ansi-language:EN-US">La vivisection reste un sujet d’actualité polémique.
Il est injustifié moralement de sacrifier des animaux pour des fins douteuses.
Les scientifiques, pas plus au XIXe siècle qu’au XXIe siècle ne forment un bloc
monolithique : ils sont nombreux à s’opposer à l’exploitation animale.
C’est pourquoi un des défis du XXIe siècle, consiste à abolir la vivisection au
nom de la dignité et du respect de l’animal.</span></p>
<p class="MsoNormal" style="text-align:justify;text-justify:inter-ideograph;
mso-pagination:none;mso-layout-grid-align:none;text-autospace:none"><span lang="EN-US" style="font-size:10.0pt;font-family:"Lucida Grande";mso-ansi-language:
EN-US"><o:p> </o:p></span></p>
<p class="MsoNormal" style="margin-bottom:12.0pt;text-align:justify;text-justify:
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<p class="MsoNormal" align="right" style="text-align:right"><span lang="EN-US" style="font-size:10.0pt;font-family:"Lucida Grande";mso-ansi-language:EN-US">Laurence
Harang</span></p>