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Sous surveillance
dans la catégorie Histoires
A partir d'une couverture de livre : Elite Tome 2, de Joelle Charbonneau, aux éditions Milan

"Elle scintillait. La lumière scintillait à s’en faire mal aux yeux. Il le savait, pourtant, il continuait à fixer cette lumière jaune pendue au plafond par un fil noir. Elle se balançait au rythme des pas des invités à l’étage d’au-dessus. Le scintillement n’était pas régulier. C’est d’ailleurs pour cela qu’il la fixait. Il tentait en vain de décrypter un message secret en morse ou en alien l’autorisant à sortir de cette boîte vide décorée d’une lampe jaunâtre et d’un mur d’écrans allumés montrant de fond en comble la vaste pièce d’au-dessus. Un chandelier étincelant en son centre survolait une salle bondée d’invités tous plus riches les uns que les autres. Ils parlaient, mangeaient, mais la plupart observaient avec admiration et envie la collection d’objets de valeur décimés autour d’eux. Entourés d’une vitre impeccable et posés sur un coussin de velours, les diamants, sculptures, vases, et même une pile d’or pur reposaient calmement, attendant que les convives les dévorent des yeux. Et lui, ils les observaient à travers une multitude de vieils écrans crasseux en noir, blanc et gris. C’était lui qui se chargeait de la sécurité par surveillance ce jour-là. Il avait perdu son pari avec ses collègues et devait supporter les 8 heures de surveillance sur cette exposition qui servait seulement de prétexte pour réunir les plus riches et les amadouer. Certains craignaient un vol, ou pire : des vicieux et sales journalistes ou paparazzis. Lui s’en fichait. Il avait hâte de rentrer chez lui, chez les modestes, loin de ce superficiel retransmis par des caméras d’un ancien temps. Il décodait le message de l’ampoule lorsqu’un écran s’éteignit. Il ne le remarqua pas, trop préoccupé par la lumière vacillante. Puis une deuxième s’éteignit. Une troisième, une quatrième. Une hécatombe effrayante. Presque 10 s’étaient éteints lorsqu’il s’en était rendu compte. La vieille ampoule mourra elle aussi, et sa tête incrédules n’était éclairée que par l’éclairage blanchâtre des écrans restants. Ils viraient tous au noir lorsqu’il n’en resta qu’un. On voyait la riche pièce assaillie par des silhouettes sombres. La panique s’était bien installée là-haut et l’on percevait des cris et des bruits de pas affolés courant dans tous les sens. Le dernier écran s’est éteint. Les pas s’étaient arrêtés. Le silence distordant régnait dans cette boîte obscure peuplé d’un surveillant pas assez prêt pour comprendre ce qu’il allait lui arriver. L’écran du milieu s’est rallumé avec un seul texte : “Il est de retour.” Tous les écrans, viraient en un blanc aveuglant. Un coup dans la nuque, par-derrière, arrêta tout et il sombra dans l’inconscient." Simeth "Il y avait des caméras partout. Dans cette école réputée, la surveillance n’était pas négligée. Il y avait une salle, cachée dans le sous-sol du bâtiment dont la fonction même était de scruter. Quelques milliers d’étudiants apprenaient ici, et la plupart ne se doutaient de rien. Le comble, c’est que ces élèves de sociologie étudiaient la panoptique -ou pour faire court, voir sans être vu. Alors, vous me direz, le système doit être extrêmement bien fait, pour qu’ils ne perçoivent rien. Plusieurs personnes étaient chargées de les surveiller; ces jeunes gens hors normes qui détenaient un secret. Mais ils savaient jouer. Ils savaient jouer sur les apparences, le mensonge et quelques stratagèmes pour semer leurs espions; évidemment, ils savaient qu’ils étaient observés. Mais alors, où étaient les caméras si des êtres normaux, même s’ils le souhaitaient, ne pouvaient les voir? En réalité, ceux-là étaient naïfs et bien trop confiants. Ceux qui pouvaient percevoir la menace sentaient en fait un regard parfois appuyé, qui étudiait leurs expressions et ce qu’ils disaient avec la minutie d’un chirurgien. Alors, ils voyaient dans les yeux de leur interlocuteur, une flamme; ceux-ci brûlaient d’envie de savoir tout à leur propos. Dans ces mêmes yeux, l’élite avait trouvé un éclat assez particulier dans les pupilles, comme si des puces y étaient implantées. Leurs yeux ne sont sûrement que des caméras qui véhiculent ce qu’ils voient -contre leur gré. " Isaya