Coraline, Neil Gaiman
Dans : Lire, dire, écrire
Par Barbara Hertzog-Malenfant le 12 mars 2014, 16:36 - Lire, dire, écrire - Lien permanent
Nous avons étudié cet extrait du roman de Neil Gaiman, Coraline.

Elle remit pied à terre et ramassa les clés avec un sourire victorieux. Puis elle cala le balai contre le mur et se rendit dans le grand salon. […] La clé noire était plus froide que les autres. Coraline l’introduisit dans la serrure. La clé tourna aisément avec un déclic satisfaisant. Coraline s’immobilisa et tendit l’oreille. Elle savait très bien qu’elle faisait quelque chose d’interdit. Etait-ce sa mère qui rentrait ? Non, on n’entendait pas un bruit. Elle actionna la poignée, la porte s’ouvrit.
De l’autre côté, elle déboucha sur un couloir plongé dans l’obscurité. Le mur de briques avait disparu, comme s’il n’avait jamais été là. Une froide odeur de renfermé parvint à ses narines, ça sentait comme quelque chose de très vieux et de très lent. Coraline franchit le seuil. Elle se demanda à quoi pouvait ressembler cet appartement, s’il y avait bien un appartement … Elle s’avança intimidée. Le couloir avait quelque chose de très familier. Sous ses pieds, le tapis était le même que chez elle. Le papier peint était identique. Le tableau accroché au mur avait son exacte contrepartie dans le couloir de son appartement. Elle comprit où elle se trouvait : chez elle. Elle n’en était jamais sortie.
Perplexe, elle secoua la tête. Elle examina le tableau. En fin de compte, ce n’était pas exactement le même. Le leur représentait un petit garçon vêtu à l’ancienne qui observait des bulles. Mais celui-ci avait une expression différente, il avait l’air de mijoter un coup pendable. Avec quelque chose de bizarre dans les yeux. Coraline y regarda de plus près en essayant de saisir ce que les deux tableaux avaient de différent. Au moment où elle allait y parvenir, une voix appela : « Coraline ? »
On aurait dit la voix de sa mère. Coraline alla dans la cuisine, car c’était de là que venait la voix. Une femme s’y tenait, le dos tourné. Elle ressemblait un peu à sa mère. Sauf que …
Sauf qu’elle avait la peau blanche comme un linge. Sauf qu’elle était plus grande et plus mince. Sauf que ses doigts étaient trop longs, qu’ils n’arrêtaient pas de bouger, et que ses ongles rouge sombre étaient pointus et tout recourbés.
« Coraline, fit-elle, c’est toi ? »
Alors elle se retourna. A la place des yeux, elle avait de gros boutons de chemise.
« A table Coraline, ajouta-t-elle.
- On se connait ? demanda Coraline.
- Je suis ton autre mère. Va dire à ton autre père qu’on passe à table. »